Les marques et publicitaires du monde entier cherchent la formule magique pour capter l’attention de la Gen Z. Car ces adolescents et jeunes adultes (entre 12 et 27 ans) sont encore une énigme sur le plan du marketing, entre ados influenceurs d’achats et jeunes actifs affranchis des codes traditionnels de la consommation.
De nombreuses études, notamment le sixième rapport annuel Culture Next Gen Z de Spotify ont paru récemment sur le sujet. Alors tentons de cracker le code.
Qui est aujourd’hui l’énigmatique Génération Z ?
La Génération Z représente 25% de la population mondiale (20% en Amérique du Nord et 17% en Europe) (NIQ, GfK et World Data Lab 2024). Mais pour les statisticiens et sociologues elle reste largement insaisissable. Car « Gen Z » désigne un vaste éventail de réalités pour des personnes nées entre 1997 et 2012, et ayant donc entre 12 et 27 ans. Aux différences de situations sociales, familiales, culturelles et économiques s’ajoutent aussi des différences géographiques.
Pour nous rappeler de ne jamais faire de généralisations autour des générations, soulignons aussi que selon le Rapport Générations 2024 d’Ipsos, seuls 41% des 12-28 ans s’identifient à ce que représente la notion de Génération Z. Selon Ipsos « En tant que natifs du numérique, ils pourraient former des « tribus mondiales » transfrontalières, unies par une culture générationnelle spécifique et durable, tout en se distinguant localement ».
Quel est le pouvoir d’achat de la Gen Z ?
En France le pouvoir d’achat de le Gen Z n’était que de 4% des dépenses des ménages en 2022 (Source OC&C), contre 13 % en Chine et 7,5 % au niveau mondial. Sur des chiffres mondiaux actualisés en 2024 elle représente déjà 17,1% des dépenses et de la consommation (sur un total mondial de 57,6 trillions de $) et devrait représenter 18,7% d’ici 2030 (World Data Lab, Generations Forecasts). C’est pourquoi marques et publicitaires doivent déjà à tout prix essayer d’élucider l’énigme « Gen Z » pour capter dès aujourd’hui les consommateurs de demain.
Qu’est ce qui fait vibrer la Gen Z ?
Malgré toutes ses différences, la Gen Z partage aussi certaines valeurs et habitudes qui influencent sa consommation de culture, de produits et de services. Nous parlons bien sûr de la consommation d’internet et des réseaux sociaux, sur mobile, et des plateformes de streaming audio et vidéo mondiales de Netflix, à Amazon Prime, Disney+ et Spotify.
Aux États-Unis, 35% des Gen Z passent plus de 4 heures par jour sur les réseaux sociaux et seulement 4% moins d’une heure par jour. Pour 54% des Gen Z, leur plateforme préférée est YouTube (80% y passent du temps et ont le réflexe de rechercher des contenus éducatifs et de divertissement en vidéo), suivie par Instagram (75%), TikTok (69%) et Snapchat (63%). (Rapport Morning Consult, janvier 2024)
Spotify : 251 millions d’utilisateurs de la Gwen Z (2024)
La musique et les contenus audios sont un grand révélateur des goûts de la Gen Z, forte consommatrice de divertissement mobile. Selon Spotify, 251 millions d’utilisateurs de la génération Z utilisent sa plateforme dans leur vie de tous les jours (NDLR : soit 40% de ses 626 millions d’utilisateurs sur plus de 180 marchés, à septembre 2024). Précision méthodologique : les Gen Z sondés par Spotify ont entre 15 et 24 ans. Détails de la méthodologie et chiffres mondiaux disponibles sur le site de Spotify destiné aux annonceurs.
Parmi les contenus Spotify les plus appréciés par la Gen Z :
- La vidéo, avec les extraits des vidéos des artistes streamés. La consommation de vidéos par la Gen Z sur Spotify a augmenté de 81% de 2023 à 2024.
- Les livres audios. Les 18-34 ans (les plus vieux Gen Z et les plus jeunes Millenials nés dans les années 90) représentent 57% des auditeurs de livres audio sur Spotify.
- Les contenus personnalisés, notamment avec DJ IA, un outil de suggestion basé sur l’historique des écoutes, lancé en février 2023. Gen Z et Millenials représentent 87% des écoutes de DJ IA.
La Génération Z a besoin de connexion sociale mais est déçue des réseaux sociaux
D’après le rapport Spotify, la Gen Z recherche les connexions sociales et des liens authentiques, aussi bien dans la vraie vie que sur Internet. Mais cette génération est aussi désabusée des réseaux sociaux qui selon elle augmentent le sentiment d’isolement.
De fait, 54 % des jeunes de la génération Z en France estiment que les gens sont plus seuls aujourd’hui qu’il y a 10 ans. Ipsos avait aussi mesuré chez les jeunes français ce sentiment de stress ou de solitude partagé par 56% des 12-28 ans.
(NDLR : Rappelons que la Gen Z avait entre 2 ans et 17 ans il y a 10 ans, et qu’entre-temps leur réalité a été considérablement chamboulée par la Covid, la crise économique et leur entrée dans l’âge adulte)
La Gen Z se tourne alors vers la musique et les podcasts pour trouver des connexions plus authentiques. Pour socialiser, elle pratique le « blend », c’est-à-dire fusionner ses goûts musicaux dans une playlist partagée avec ses amis ou même des célébrités comme Charli XCX, Diplo et Lizzo. 60 % des playlists Blend créées et partagées sur Spotify ces deux dernières années sont par des utilisateurs de la génération Z.
Du « doom scrolling » à la dépression
La Gen Z cherche aussi à être auteur de sa propre aventure sur les réseaux et ainsi à éviter la consommation passive et excessive de contenus ou « doom scrolling ». Ce « scrolling frénétique » peut mener à des comportements addictifs et dépressifs.
Précisons qu’au niveau mondial 28% des Gen Zs, et 24% des millennials se disent anxieux. Aux Etats-Unis, ils sont trois fois plus susceptibles que n’importe où ailleurs dans le monde de déclarer qu’ils ont actuellement un problème de santé mentale. 16% se déclarent même en dépression. (Rapport GWI « Connecting the dots » sur les tendances 2024) Certaines grandes marques sont déjà positionnées sur cet enjeu avec des campagnes de sensibilisation. Citons notamment Dove et son projet « Estime de soi » qui vise à protéger adultes et enfants de la beauté toxique relayée par les réseaux sociaux.
Des Gen Z créateurs de la « bande-son » de leur vie
La musique joue un rôle clé dans la vie des jeunes de 12 à 27 puisqu’elle rythme toutes leurs premières expériences et émotions marquantes et qu’ils veulent les partager. Ils semblent aussi déjà anticiper leur future nostalgie puisque 81% des Français de la génération Z déclarent dans l’étude Spotify « la musique que j’écoute en ce moment aura toujours une place de choix dans mon cœur ».
(NDLR : ce phénomène d’attachement et de nostalgie est bien connu des publicitaires qui peuvent utiliser les repères musicaux d’une génération pour créer une connexion émotionnelle et de la mémorisation à long terme. Spotify a d’ailleurs déjà mené des études expérimentales en neuromarketing pour identifier quel type de publicité diffuser en fonction de la musique ou du podcast écouté et ainsi transférer l’ « engagement » de l’auditeur vers la publicité.)
Une génération Z aussi connectée aux « live »
Autre particularité de cette génération pré-nostalgique : sa volonté de vivre plus pleinement le présent et de participer à des évènements en « live ». L’étude Ipsos « Génération 2024 » (Juin) nous confirmait aussi cette relation de la Gen Z au présent. Ainsi en France, 71% des Gen Z pensent que « l’important est de profiter de la vie aujourd’hui et que demain se fera tout seul ».
Ainsi 74 % des membres de la génération Z ont assisté à un concert ou à un spectacle de musique live au cours de la dernière année. Mais assister à un concert « live » peut être financièrement inaccessible pour de nombreux jeunes, ce qui ouvre une opportunité pour les marques. En effet, 44% des Français de la génération Z déclarent qu’ils seraient « plus susceptibles d’acheter un produit d’une marque après avoir découvert qu’elle sponsorise des événements musicaux en live ou des concerts ».
Une Gen Z qui veut se distinguer mais adopte aussi des comportements « mainstream »
La mystérieuse Génération Z traverse actuellement le pont entre l’enfance, l’adolescence et l’âge adulte. Une période charnière où les goûts se définissent et peuvent se figer. Il est donc intéressant de voir que la Génération Z n’est pas forcément anti-conformiste ou « audacieuse » dans ses choix musicaux.
Ainsi 74 % des jeunes sondés par Spotify décrivent leur génération comme « mainstream ». Mais attention, le mainstream musical de la Gen Z n’est pas celui de leurs parents avec des artistes aux influences hybrides et qui s’affranchissent des genres musicaux classiques, comme le chypriote Artemas, la brésilienne Ludmilla et l’américaine Chappell Roan.
(Source : 6e Rapport Culture Next Gen Z de Spotify)
Séverine Godet