Mais si on comptabilise le total des publications des partis et de leurs (co)présidents, c’est le MR qui caracole en deuxième position, juste derrière le Vlaams Belang. ©Belga Images
Que les politiciens les aiment ou non, les réseaux sociaux sont devenus incontournables. Une leçon durement apprise en 2019, lorsque le Vlaams Belang est passé de 3 à 18 sièges à la Chambre des représentants, en partie grâce aux 400 000 € dépensés sur Facebook, soit la moitié des dépenses de tous les partis flamands. Un moyen idéal de transmettre une rhétorique agressive dont les algorithmes raffolent, séduisant ainsi les jeunes et les électeurs déçus de la N-VA.
Rien qu’en 2024, “si l’on additionne les principaux canaux des partis et ceux de leurs (co)président(e)s confondus, les politiques belges ont publié 64 % de posts en plus qu’en 2023”, peut-on lire dans l’étude de Xavier Degraux, consultant en marketing digital.
Des spammeurs professionnels…
Mais la palme du plus gros spammeur sur les réseaux sociaux en 2024 revient à… roulements de tambour… Georges-Louis Bouchez. Et le monde médiatique l’a suivi dans sa frénésie, réagissant à toutes ses provocations, lui offrant ainsi la possibilité… de poster à nouveau ! Ses phrases “chocs”, en réaction aux débats médiatiques, sont parmi les plus engageantes auprès des internautes, exaltés d’être immergés dans cette guéguerre où chacun se renvoie la balle.
Si son goût pour la polémique n’étonne personne, le fait qu’il se classe juste au-dessus de Tom Van Grieken, figure d’extrême droite par excellence, marque un tournant. “Je ne m’attendais pas à un tel décalage entre la présence de Georges-Louis Bouchez sur les réseaux sociaux et celle de l’extrême droite”, s’étonne encore Xavier Degraux. En effet, le président du MR a posté 4 409 messages sur tous réseaux confondus en 2024, contre seulement 2 381 pour le président du Vlaams Belang, Tom Van Grieken.
et un spammeur insoupçonné
Encore plus surprenant, François De Smet se classe en troisième position avec 1 721 posts diffusés en 2024. La starification de la fonction politique ne lui a sans doute pas échappé. Il devait légitimer la décision de son parti de le désigner comme représentant de Défi aux élections, plutôt que de confier cette tâche à Olivier Maingain, pourtant bien plus populaire.
Cependant, les propos nuancés du philosophe intéressent peu les algorithmes, avides de contenu polarisant. “Paul Magnette s’est adapté, réagissant dès qu’il le pouvait aux attaques et aux fake news. Depuis qu’il est dans l’opposition, ses publications connaissent forcément un grand succès, car il porte un discours plus critique, plus négatif, qui génère plus d’interactions.”
En bref, l’idée de François De Smet était bonne, mais sa méthode appartient à une époque où la simplicité et la virulence des propos n’étaient pas forcément synonymes d’audience. Un logique qui ne fera que se renforcer vu la décision de plusieurs plateformes de ne plus modérer les contenus. Néanmoins, les résultats des partis sont évidemment multifactoriels, influencés par leur présence numérique, mais aussi par leur stratégie politique et leur ancrage sur le terrain.
D’autant plus que François De Smet n’a pas été suivi par son parti, qui n’a publié que 1 412 posts en 2024, contre les 4 769 du Vlaams Belang. Un problème stratégique, mais aussi structurel, dans un modèle de financement des partis largement dépendant des dotations issues de leur succès électoral. Un véritable cercle vicieux où les partis extrêmes et populistes ont une longueur d’avance, creusant toujours plus l’écart avec les autres.
Plafonner les dépenses des partis sur les réseaux sociaux
Voilà pourquoi certains plaident pour un plafond annuel des dépenses des partis sur les réseaux sociaux, où la campagne électorale se déroule 7j/7 et 24h/24. Mais est-ce vraiment suffisant, sachant que les contenus diffusés gratuitement ont un impact non négligeable et que, in fine, leur production nécessite des moyens et donc des dotations importantes ?
“Je ne pense pas qu’il faille limiter le nombre de contenus que les partis et leurs membres ont le droit de publier. Dans une démocratie saine, chacun doit être libre de s’exprimer à travers les réseaux sociaux, à condition de ne pas diffuser de fake news et de respecter la légalité”, estime Xavier Degraux, qui plaide davantage pour “agir via l’éducation aux médias”.