L’époque aime les cases. Agence luxe, agence digitale, agence corporate, agence social media. Mais à force de vouloir se rassurer, le marché pousse les agences à se définir plus qu’à cultiver leur expertise. Il faut entrer dans une case pour signer plus facilement des projets. Un positionnement tranché est donc un atout efficace. Mais positionnement ne veut pas dire spécialisation.
Les agences indépendantes doivent prouver leur valeur sans tomber dans l’écueil de la spécialisation à outrance ni dans celui de la pluridisciplinarité contradictoire. On ne compte plus les occurrences du mot « pluridisciplinaire » sur les sites d’agences de création. Ceci traduit une envie de ne pas être réduit à une case. Le paysage actuel du secteur offre un spectacle paradoxal. D’un côté, des agences ultra-spécialisées. De l’autre, des structures qui prétendent tout faire. Puis au milieu, un certain vide créatif. Pourtant, la valeur d’une agence ne se résume pas à sa capacité à cocher toutes les cases mais à son intelligence, sa méthode et son style.
Par exemple, Uncommon London ne se revendique pas « pluridisciplinaire » et passe pourtant du luxe à la grande consommation, du film au design d’expérience, sans jamais diluer sa créativité. Multiplier les terrains d’expression sans se diluer, voilà sans doute l’enjeu principal des agences indépendantes aujourd’hui. Dans ce jeu à l’équilibre complexe, savoir élargir son spectre sans perdre sa singularité est une des clés pour durer.
Une bonne idée transcende le média
Une grande idée n’est jamais circonscrite à son support de diffusion. Elle s’adapte évidemment au discours qu’elle porte et au contexte dans lequel elle s’inscrit. Mais partir du contexte ne permet jamais d’aboutir à une grande idée à rebours. Qu’il s’agisse d’un film, d’un produit ou d’une expérience digitale, l’idée prime toujours. Une bonne idée transcende son média. C’est quand les gens en parlent, qu’ils en prennent des photos, qu’ils la partagent qu’on peut considérer qu’une idée a fonctionné. C’est donc partout ailleurs que sur les médias, qui ne sont que des points de passage. C’est sur un banc dans la cour du lycée, c’est à la machine à café avec des collègues ou à la table d’un dîner que se mesure réellement le succès d’une idée.
Une agence qui s’enferme dans une spécialité technique risque d’affaiblir sa pensée stratégique. Ce ne sont pas les expertises digitales, réseaux sociaux, 360 – et plus récemment IA – qui doivent définir les pratiques. Elles doivent prolonger la chaîne depuis les bonnes idées jusqu’à leur réception sur un smartphone, une affiche ou un pré-roll YouTube. Les techniques changent aussi vite que les supports. Une des rares constantes pour les agences est la capacité à penser et à créer. Ne la perdons pas.
La spécialisation à outrance est une force d’un point de vue commercial. « Nous sommes experts en TikTok » est plus facile à vendre en 2025 que « Nous trouvons de bonnes idées ». Pourtant, le meilleur investissement pour une marque qui veut émerger sur TikTok est précisément d’investir sur des idées suffisamment fortes pour retenir l’attention sans échouer à communiquer leur message.
Les agences doivent souvent prouver que chaque euro est bien investi. Le premier bon investissement est justement de développer de bonnes idées. Ce qui coûte le plus cher aux annonceurs sont les campagnes de formes sans fond, ignorées, « skipées » ou « adblockées ». Les agences indépendantes ont une vraie carte à jouer. Moins contraintes, elles peuvent cultiver une expertise forte : comprendre les enjeux, analyser les comportements et trouver des réponses créatives inédites hors des sentiers battus. Ce raisonnement n’est pas que créatif. Il est aussi pragmatique. Une bonne idée peut permettre de dépenser moins en production. Elle peut s’adapter plus facilement à différents médias et, dans le meilleur des cas, elle peut traverser le temps.