À San Francisco, un virage identitaire que nous avons vécu de l’intérieur
Le 3 septembre au matin, la Main Stage du Moscone Center accueillait la conférence d’ouverture d’Inbound 2025. À la tribune, Yamini Rangan, directrice générale de HubSpot, lançait l’édition annuelle du grand rendez-vous mondial de l’éditeur américain de solutions CRM et marketing. Siècle Digital était sur place pour assister à ce moment charnière.
D’entrée de jeu, Yamini Rangan a choisi un registre très personnel, racontant l’émotion d’avoir déposé son fils à l’université deux semaines plus tôt. Une question est restée en suspens : « Que dois-je apprendre pour avoir un meilleur avenir ? » Derrière cette interrogation d’étudiant se dessine en réalité une inquiétude universelle : comment rester pertinent dans un monde bouleversé par l’intelligence artificielle. « Avec l’IA, nous en venons à questionner la valeur humaine », a-t-elle lancé. Pour Yamini Rangan, l’enjeu dépasse largement la productivité ou l’efficacité des équipes : il renvoie à l’identité même des individus et à leur place dans un futur remodelé par l’IA. « Ce moment n’est pas seulement une affaire de productivité. C’est une affaire d’identité. »
De l’inbound à ce que beaucoup appellent déjà « l’apocalypse du trafic »

Yamini Rangan sur la scène d’Inbound 2025 – © Photo Siècle Digital
Les premiers points de contact avec les marques se sont éparpillés : les acheteurs naviguent désormais entre TikTok, YouTube, Reddit ou encore les podcasts. L’étape de la recherche d’information a elle aussi changé de nature, bouleversée par les AI Overviews. « 60% des recherches Google finissent sans aucun clic. Zéro. Voilà pourquoi votre trafic organique s’effondre. On appelle ça l’apocalypse du trafic », a lancé Yamini Rangan.
Le message était d’autant plus fort que HubSpot a bâti une grande partie de sa notoriété et de sa croissance sur le blog et le contenu inbound, véritable vitrine de son expertise marketing. « Tout le monde m’a envoyé les articles sur la chute du trafic, même ma mère qui ne lit pas de blogs », a-t-elle ironisé, reconnaissant que la maison HubSpot est elle-même touchée par ce séisme. Le trafic de ses blogs recule, les contenus en ligne captent moins l’attention, et la firme a dû anticiper ce mouvement dès 2022 en diversifiant ses canaux.
Reste un motif d’espoir : la phase de décision des acheteurs évolue différemment. Grâce à l’IA, les signaux d’intention sont mieux détectés et les entreprises peuvent proposer des contenus plus personnels, plus contextuels et plus pertinents, capables de convaincre plus vite.
The Loop : le playbook de croissance pensé pour l’IA

Yamini Rangan présentant The Loop – © Photo Siècle Digital
Au cœur de la conférence, HubSpot a dévoilé The Loop. Exprimer, adapter, amplifier, faire évoluer. « Ce n’est pas statique. Ce n’est pas linéaire. C’est dynamique, toujours en apprentissage. Et au centre, il y a un nouveau partenariat entre les humains et les agents », a expliqué Yamini Rangan.
Avec ce nouveau concept marketing, HubSpot entend rompre avec la logique séquentielle qui a longtemps structuré la relation entre marques et consommateurs. Le modèle repose sur une interaction continue : chaque action ou point de contact nourrit un apprentissage permanent, soutenu par l’IA, pour renforcer la pédagogie, créer du lien et bâtir des relations durables. L’enjeu est clair : personnaliser à grande échelle dans un environnement où les acheteurs naviguent entre une multitude de canaux numériques.
Dans ce schéma, toutes les étapes du parcours, de la sensibilisation à la décision, s’appuient sur l’analyse prédictive. Les entreprises sont invitées à affirmer leur identité dès le départ, puis à ajuster rapidement leurs actions grâce aux retours du terrain, optimisés par l’IA. Le but : gagner en agilité sans perdre en cohérence, et offrir une expérience utilisateur toujours plus qualitative.
Affirmer sa voix, aller chercher ses audiences
Le nouveau modèle présenté par HubSpot démarre par une idée simple : avant de créer du contenu avec l’IA, il faut exprimer sa propre voix. « Si l’IA n’a pas de point de vue clair, le contenu sera fade. En clair, ce sera du spam », a averti Yamini Rangan. Elle-même travaille avec un guide personnel qu’elle partage avec ses équipes : « Soyez clair. Soyez curieux. Soyez humain. Soyez concis. » Pour elle, l’IA ne doit pas remplacer la voix d’une marque mais l’amplifier.
Cette démarche trouve déjà des échos chez les clients de HubSpot. Morehouse College, par exemple, a intégré ses chartes graphiques et son ton éditorial directement dans les outils de la plateforme. « Nous avons téléchargé nos guides de marque. Le contenu généré sort immédiatement avec notre voix à l’esprit », ont expliqué ses responsables. Résultat concret : une hausse de 30 % des pages vues et 27 % de temps supplémentaire passé sur le site.
Vient ensuite l’enjeu de la diffusion. HubSpot reconnaît que les temps où le blog centralisait l’attention sont révolus. Désormais, les contenus doivent circuler là où se trouvent les audiences, qu’il s’agisse de vidéos, de podcasts, de newsletters ou des moteurs de réponse pilotés par l’IA. « Les gens ne veulent pas dix liens bleus. Ils veulent une réponse de confiance », a résumé Yamini Rangan. Cette stratégie de diversification a payé : leads doublés sur YouTube, +90 % via les newsletters, et des contacts issus des LLM qui convertissent trois fois mieux.
Nouvelles fonctionnalités HubSpot basée sur l’IA

Logo HubSpot à Inbound 2025 – © Photo Siècle Digital
Sur scène, Karen Ng, responsable produit, a résumé la feuille de route : HubSpot veut s’imposer comme la plateforme des équipes hybrides, où humains et IA travaillent côte à côte. La base repose sur un CRM capable de s’enrichir automatiquement et sur un nouvel outil baptisé Data Hub, pensé pour connecter et fiabiliser toutes les données clients.
Autour de ce socle, HubSpot déploie des solutions destinées à simplifier le quotidien : Marketing Studio, qui transforme une simple idée en campagne multicanale, Segments, pour mieux cibler les audiences, ou encore des emails personnalisés par l’IA, qui ont déjà fait grimper les conversions de 82 % en interne. Côté ventes, l’intégration d’un système de devis assisté par l’IA (CPQ) doit fluidifier la signature.
À cela s’ajoutent Breeze Assistant, un compagnon virtuel intégré aux usages quotidiens, et plusieurs agents spécialisés (service client, prospection, gestion de données) que chaque entreprise peut personnaliser via un nouveau marketplace.
À Inbound 2025, un souffle d’optimisme face à l’IA
De cette conférence, nous avons retenu une boussole claire. « Les humains mènent. L’IA accélère », a insisté Yamini Rangan. Pour grandir à l’ère des réponses générées par l’IA, il faut exprimer sa voix, adapter au segment de un, amplifier au-delà du site en misant sur l’AEO et les créateurs, et faire évoluer en continu.
Dans la salle, ce message sonnait comme un plan d’action. Ne pas courir après le clic. Construire la confiance. Et l’ambiance contribuait à le graver dans les esprits : une mise en scène spectaculaire, une salle comble et un public réactif, oscillant entre rires, applaudissements nourris et explosions de joie à chaque annonce phare. À l’américaine, donc, avec une énergie communicative. Depuis l’espace réservé à la presse, Siècle Digital a pu mesurer à quel point l’audience réagissait avec enthousiasme. Un signe que ce « Loop » n’est pas seulement une promesse marketing, mais déjà une source d’espoir pour des professionnels en quête de nouvelles certitudes à l’ère de l’IA.