The TV Society : Réinventer la création publicitaire à l’ère du multi-écrans


Face à la complexité du paysage médiatique, les experts s’accordent sur la nécessité de centrer la stratégie sur un concept créatif fort, établi par l’humain.

Pierre-Louis Fontaine, Expert marketing digital indépendant,  met en garde contre une erreur de conception courante : celle de croire qu’« un écran répond à un 2ème écran qui lui répond à un 3ème écran » pour former un storytelling. Il rappelle que cette approche est difficilement vérifiable, car nous n’avons pas les outils pour le prouver.

Pour éviter cette erreur, il insiste sur la nécessité d’une « Big ID » (concept de communication créative) qui « couvre le tout dès le départ ». Cette idée maîtresse doit être mémorisée le plus rapidement et fortement possible par les cibles. Une fois la « Big ID » installée, elle sert de base à toutes les déclinaisons. Il précise que, selon les cibles, il y a souvent un « gros leader en termes de média » — souvent la télévision pour les cibles plus âgées — pour « installer le concept » avec puissance.

De son côté, Camille Baud, Director, AdTech & Partnerships de Jellyfish, explique que la multiplication des écrans entraîne une « durée d’attention utilisateur cible qui maintenant est très courte ». Par conséquent, il est essentiel que les messages soient « impactants, plus courts et surtout que dès les premières secondes on puisse identifier l’annonceur ». Il ajoute que, au-delà du concept central, il est impératif de « reprendre les codes des différentes plateformes » pour que l’expérience publicitaire soit adaptée à l’audience.

L’IA : un optimiseur de temps avant tout

Concernant l’intelligence artificielle, les participants s’accordent à lui attribuer un rôle d’exécution et de productivité, plutôt que de conception.

Pierre-Louis Fontaine déclare sans ambiguïté que « l’IA ne participe pas à la conception ». Son rôle est de transformer « une conception réfléchie par un humain en plusieurs formats ». Il la qualifie d’« outil d’optimisation du temps » permettant d’industrialiser la déclinaison du concept.

Il cite plusieurs outils AdTech illustrant cette tendance :

  • N8N : Une plateforme qui permet d’automatiser la fabrication et la démultiplication des éléments de communication en fonction du support de diffusion.
  • Les solutions Adobe : Présentées lors de l’Adobe Summit, elles permettent également la déclinaison d’un concept global.
  • Outil Amazon : Un outil capable d’« aspirer toute une chaîne graphique d’un site internet » (logo, imagerie, typo) pour créer automatiquement les éléments publicitaires à diffuser sur sa plateforme en mode programmatique.

Camille Baud se dit « totalement aligné » avec cette vision. Selon lui, la fonction première de l’IA, quel que soit le secteur, est de « faire gagner du temps sur des tâches répétitives chronophages à faible valeur ajoutée ». Cela permet aux équipes créatives et aux directeurs artistiques de se concentrer sur l’idéation et de « créer de nouveaux concepts créatifs ».

Les défis de l’évaluation de la performance multi-écrans

L’évaluation de l’efficacité d’une création déclinée sur différents canaux reste un point de friction.

Pierre-Louis Fontaine souligne qu’il n’existe pas d’outil permettant une « vision totalement linéaire et sans couture » de la performance sur tous les canaux en même temps. La raison principale est la différence de méthodologie : la télévision repose sur le panel, tandis que le suivi digital utilise le last click ou le post-view. Il ajoute que l’avenir verra l’IA en mode programmatique prendre des décisions d’optimisation en temps réel, pouvant donner l’ordre de stopper ou de changer immédiatement une création.

Visibilité future : l’impératif du contenu face à l’IA

En conclusion, la discussion a porté sur la façon de préserver la qualité créative et l’impact émotionnel.

Pierre-Louis Fontaine réaffirme que la qualité repose toujours sur la « Big ID », illustrant son propos avec la stratégie de Renault (R5, 4L, Twingo) qui installe des « univers extrêmement forts » (codes couleur, musique) qui sont ensuite déclinés et adaptés en fonction des canaux et des cibles.

Camille Baud ajoute que, pour les jeunes marques aux budgets limités, la « qualité prime sur quantité ». Il recommande de s’adosser à des créateurs de contenu ou de développer son propre contenu organique pour créer du lien et une communauté.

Pour Pierre-Louis Fontaine, la génération de contenu permanente est la « constante absolue » de la stratégie. Il avertit que l’émergence d’agents conversationnels basés sur l’IA (comme Perplexity) entraîne un « phénomène d’impression zéro clic ». Pour rester visible auprès de ces IA et être considéré comme une source pertinente, les marques doivent produire des contenus « extrêmement charpentés, originaux et récents ». Il conclut que l’internaute mute d’une recherche par mot-clé à l’expression d’un « besoin personnel », et le contenu doit être structuré pour y répondre directement.



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