Avons-nous encore besoin des ordinateurs et imprimantes ? – FredCavazza.net


Saviez-vous que les ordinateurs personnels existent depuis 60 ans (40 en entreprises) ? Une incroyable longévité pour des outils qui arrivent maintenant en fin de vie, du moins pour celles et ceux qui acceptent de regarder la réalité en face : les entreprises et organisations sont en décalage complet avec un environnement de marché bouleversé par la permacrise et la révolution numérique, mais s’entêtent néanmoins à faire perdurer des méthodes et outils de travail qui appartiennent à un autre siècle.

Une fois n’est pas coutume, le titre de l’article est un peu provocateur, mais il est néanmoins le point d’entrée d’une réflexion de fond sur les outils numériques, le travail, les entreprises… Souvenez-vous, en 2008 je publiais un article intitulé Qu’est-ce que l’Entreprise 2.0 ? Certes, le sujet est passé de mode, mais la question de fond reste d’actualité, surtout dans le contexte actuel de recherche d’optimisation.

Il y a bien longtemps que nous ne parlons plus d’entreprise 2.0, car la réflexion a depuis largement évoluée et porte maintenant sur le renouvellement de l’outil informatique avec les enjeux suivants :

  • Comment passer de la culture du fichier à celle de la donnée ?
  • De quels outils et/ou services avons-nous besoin pour passer du paradigme informatique (centré sur les terminaux et les logiciels) au paradigme numérique (centré sur les données et la connaissance) ?

Les réponses à ces questions ne sont pas simples, car le sujet de l’évolution des modes de travail peut être abordé selon différents angles. Je précise que l’idée de cet article est née de ma rencontre avec les équipes de HP, ainsi que d’une réflexion commune avec Alain Lefebvre, une sommité pour tout ce qui touche à l’informatique.

Le PC est était le meilleur ami de l’employé de bureau

Commençons notre réflexion avec l’ordinateur personnel, celui qui a accompagné la 3e révolution industrielle. Nous sommes au début des années 80 et les fabricants d’ordinateurs (IBM, HP, Texas Instrument…) courtisent le monde de l’entreprise avec des machines tournant sur la première version de MS-DOS.

Vous noterez avec amusement que les publicités de l’époque mettaient en avant la capacité des ordinateurs à mettre leur puissance au service des données, un discours pas très éloigné de celui des grands fournisseurs de solutions cloud actuellement.

Une publicité pour HP qui daterait de 1981 (à confirmer)

Dans la définition proposée par le Larousse, un ordinateur est “une machine automatique de traitement de l’information, obéissant à des programmes formés par des suites d’opérations arithmétiques et logiques“. Quand les premiers ordinateurs ont été introduits dans les entreprises, la priorité était de traiter de l’information, donc de numériser l’existant, une tâche dont ils se sont parfaitement acquittés : nous sommes passés des mémos papier aux messages électroniques, des dossiers en papier aux fichiers et répertoires, des tableaux sur papier aux grilles de calcul, des archives papier aux bases de connaissances…

La question qui se pose aujourd’hui est la suivante : Avons-nous encore des choses à numériser ? Je ne suis pas certain que plus de messages ou fichiers permettront d’améliorer la productivité, au contraire ! Il n’est de secret pour personne que la profusion d’informations nuit fortement à la productivité. Le coût de l’infobésité en termes de perte de productivité avait ainsi été évalué en 2010 par la société Basex à 997 milliards de $ rien que pour l’économie américaine. Nous ne disposons malheureusement pas de chiffres plus récents, mais il est évident que plus d’informations (emails, fichiers…) implique nécessairement plus de temps perdu à les lire / trier / classer.

Peut-être est-il temps de retirer les ordinateurs des mains des salariés pour éviter d’empirer les choses ? 🤔

Entendons-nous bien : je ne parle pas ici de priver les collaborateurs d’outils de travail, mais de ne plus leur donner systématiquement accès à une unité de production de contenus numériques, un ordinateur, qui dans le contexte actuel de l’entreprise (en tenant compte des modes de fonctionnement usuels), les pousse à produire toujours plus d’emails et de fichiers pour prouver qu’ils sont actifs et impliqués (“J’envoie des emails, donc j’existe”). Cette remise en cause de la dotation systématique en ordinateur est d’autant plus d’actualité que les PC ne sont plus les terminaux numériques de référence, largement supplantés par les smartphones (lire à ce sujet cet article du Forum Économique Mondial publié en 2016 : 4 charts that explain the decline of the PC).

Évolution des ventes d’ordinateurs personnels et de smartphones (impossible de retrouver la source)

Là encore, j’apporte une précision : je ne suis pas en train de vous expliquer que les salariés doivent se débrouiller pour travailler avec leur smartphone, mais que la généralisation de ces derniers ont contribués à une évolution irréversible des usages, accélérant même la transformation notre société (Comment les smartphones ont changé le monde en 15 ans). Nous sommes en 2023, tous les adultes sont équipés d’un smartphone capable de réaliser d’innombrables choses, pourtant dès qu’ils arrivent dans l’entreprise on les équipe avec des terminaux informatiques dont la conception remonte aux années 70 (cf. Histoire de l’informatique).

La réalité du XXIe siècle est que nous sommes coincés dans le paradigme fichiers / emails depuis 40 ans où tout tourne autour des documents, institutionnalisés par les outils bureautiques qui forment les piliers de notre culture professionnelle. Le problème est que les connaissances et les données sont piégées dans ces documents. Extraire ces dernières de tous ces fichiers représente un travail titanesque, car pour qu’elles soient exploitables par d’autres systèmes, il faut qu’elles soient stockées dans un format structuré, selon des modèles sémantiques formels (les fameux référentiels métiers). À partir de ce moment, nous pouvons libéraliser les savoirs et surtout tirer pleinement parti des intelligences artificielles et solutions d’automation qui peuvent alors réaliser une partie du travail d’analyse et des traitements courants. Mais nous n’en sommes pas là, car les données et connaissances sont toujours piégées dans des fichiers stockés sur les disques durs des uns et des autres (au mieux dans le cloud, donc dans des répertoires distants).

Changer ce paradigme fichiers / emails, nécessite de changer à la fois les façons de travailler, mais aussi la culture des entreprises. Une tâche plus complexe qu’elle y paraît, car contrairement aux travailleurs manuels qui ont connu leur révolution (l’organisation scientifique du travail), les travailleurs du savoir produisent et interagissent au quotidien de façon très spontanée, intuitive (ou pas). Ceci nous amène à réfléchir à la nature de leurs activités professionnelles, c’est-à-dire de ce qu’ils font concrètement et avec quels outils.

La notion d’entreprise et de travail à l’épreuve de la permacrise

Je pense ne rien vous apprendre en écrivant que la situation socio-économique n’a jamais été aussi tendue : démondialisation, permacrise, révolution numérique… Dans ce contexte, il semble impossible de continuer à faire comme avant (La notion d’entreprise est-elle obsolète ?).

Si nous sommes tous d’accord pour dire qu’il faut réinventer le travail, définir et mettre en oeuvre de nouvelles façons de travailler est un exercice sur lequel quasiment tout le monde s’est cassé les dents. La principale difficulté est que repenser le quotidien des travailleurs du savoir amène à se poser des questions existentielles auxquelles il n’existe pas de bonnes réponses :

  • Qu’est-ce que le travail : Rédiger des emails ? Relire et compléter des fichiers bureautiques ? Saisir des chiffres dans un ERP ?
  • Qu’est-ce qu’une bonne journée de travail : Avoir envoyé et répondu à tous ses emails ? Avoir rédigé ou validé tous les fichiers reçus ? Avoir consulté tous les tableaux de bord ?

Autant le dire tout de suite : je n’ai absolument pas la prétention de pouvoir répondre à ces questions. Mais dans la mesure où j’accompagne depuis de nombreuses années des organisations dans leur transformation digitale, je suis très bien placé pour saisir toute la complexité de ces questions : les entreprises doivent changer, car le contexte de marché n’est plus le même, mais c’est parce que le contexte de marché n’est plus le même que les entreprises ne peuvent se permettre de perturber leur fonctionnement avec des réflexions quasi-philosophiques. Modifier les habitudes et façons de travailler d’une entreprise revient à changer le moteur d’une voiture en marche : c’est un casse-tête quasi-insoluble. Dans le doute, on s’abstient, et tels des shadoks des temps modernes, nous continuons de pomper, mais plus vite.

La logique productiviste dans laquelle nous avons grandi au XXe siècle (toujours plus d’emails et de fichiers) se heurte aux impératifs du XXIe siècle (sobriété numérique). Nous ne sommes ainsi plus du tout dans une recherche éternelle d’augmentation de la production (travailler plus pour produire plus), mais de rationalisation (travailler mieux pour produire mieux) et de développement durable (assurer la rentabilité des opérations tout en limitant l’impact).

Pour rationaliser la production et aligner les priorités, il faut revoir la culture (normalement c’est en cours), les façons de travailler (plus d’agilité et de résilience) et nécessairement les outils (le sujet de cet article).

Nouveau siècle = Nouveaux défis = Nouveaux outils informatiques

Loin de moi l’idée de tenter de vous expliquer que les outils conditionnent notre façon de travailler… mais force est de constater qu’après 40 ans de dictat du Pack Office et des ERP, les travailleurs du savoir ont développé des réflexes conditionnés directement hérités des réunions par défaut d’1 h de Outlook, des abréviations et anglicismes des emails, des lignes et colonnes d’Excel, des listes à puces de Powerpoint… Bref, nous produisons ce que les outils nous autorisent à produire.

Si l’on se replace dans le contexte du XXe siècle et de la recherche de rigueur et de productivité, les ERP et les fichiers Excel étaient les supports informatiques parfaits pour assurer le suivi de longs cycles de production par le biais de forecasts et reportings. De grands tableaux qui nécessitent un grand écran et un clavier avec un pavé numérique pour accélérer la saisie et la revue de chiffres.

Nous sommes maintenant au XXIe siècle et les méthodologies rigoureuses sont remplacées par des approches plus agiles (ex : Scrum, Kaban…) qui reposent sur des boucles itératives courtes et du test & learn (la seule constante étant l’incertitude). Pour ce faire, l’important est d’expérimenter, de collaborer, de partager… tout ce que sont censés nous offrir les environnement de travail numérique en ligne.

Avons-nous besoin d’un processeur à haute fréquence ou d’un pavé numérique pour exploiter une digital workplace ? Pas nécessairement. Certes, un grand écran ou un clavier confortable sont toujours utiles, mais ils forcent les collaborateurs à adopter un style de travail sédentaire, alors que la norme est plus à la flexibilité (télétravail hybride). Ceci explique le fait qu’il se vend 3,5 fois plus d’ordinateurs portables que d’ordinateurs fixes, et surtout le succès du créneau des formats hybrides 2-en-1 (à la fois tablette et portable).

Frise d’évolution des ordinateurs personnels

Concernant les outils informatiques, c’est le même rituel depuis 40 ans : dès qu’un collaborateur intègre une entreprise, on lui remet un ordinateur avec l’accès à un nombre limité et défini à l’avance d’applications et basta, il doit se débrouiller pour faire son chiffre avec ça.

La triste réalité est que depuis plusieurs décennies, les salariés sont entièrement dépendants de leur DSI qui décide des applications qu’ils peuvent utiliser. Dernièrement, cette dépendance a entraîné la prolifération du shadow IT, l’utilisation de logiciels alternatifs sans que les responsables de la sécurité informatique en soient informés. Jusqu’à présent, ce sont surtout les solutions dans le cloud et les logiciels en ligne qui en ont bénéficié, mais avec le no-code, les collaborateurs ont maintenant la possibilité de reprendre la main sur leur environnement (numérique) de travail et concevoir leurs propres applications ou environnements de collaboration (ex : prototypage, créations d’éléments graphiques, visual planning…). Des pratiques de contournement que je ne vois pas forcément d’un mauvais oeil tant les outils fournis aux travailleurs du savoir ne sont plus adaptés à leurs besoins : De nouveaux modes de collaboration requièrent de nouveaux outils.

Selon ce nouveau paradigme, avons-nous toujours besoin d’ordinateurs conçus pour faire tourner des logiciels en local (ex : Office) ? S’il y a effectivement une catégorie bien spécifique de collaborateurs dont les compétences nécessitent des terminaux et logiciels bien spécifiques (ex : les designers graphiques avec Photoshop), la très large majorité des salariés peuvent sans problème assumer toutes les responsabilités qui leur sont données avec des applications en ligne, que ce soit de la production de documents (ex : Office365, Google Suite…), de la conception graphique ou fonctionnelle (ex : Canvas, Figma…), du suivi commercial ou relationnel (ex : SalesForce…), de l’analyse et même du nettoyage de données (ex : Tableau, Alteryx…).

Souvenez-vous que la priorité pour les travailleurs du savoir n’est plus de numériser l’existant, mais de trouver des solutions à des problèmes auxquels nous ne pensions pas être confrontés (ex : pénurie de main-d’oeuvre qualifiée, ruptures de chaine d’approvisionnement, décuplement des prix de l’énergie, télétravail généralisé…). De ce fait, il y a une priorité à donner à la libéralisation des connaissances / données et à l’assouplissement des circuits de production / décision, certainement pas de pouvoir éditer dans son coin des fichiers toujours plus lourds (ex : maquettes Photoshop) et de se faire des réunions dans le métavers.

Ce nouveau paradigme de l’outil informatique (centré sur la collaboration) est donc la conséquence d’un environnement de marché radicalement différent de ce que nous avons connu au XXe siècle où la priorité n’est plus d’augmenter la productivité, mais de rationaliser, de faire mieux avec moins. Mais pour ça, il faut des données de qualité et des outils adaptés.

File owner > Process owner > Data owner

Comme nous venons de le voir, le PC et son disque dur rempli de fichiers est le symbole d’une autre époque, celle taylorisme et des pyramides décisionnelles, plus réellement adaptée à la nouvelle réalité du quotidien post-COVID (Le travail hybride signe la fin du micro-management et le début de la supervision à distance).

Dans ce contexte, le bon vieux PC est potentiellement en fin de vie, car de nombreuses alternatives sont en train de monter en puissance. Nous ne parlons pas ici d’innovations de rupture, mais bien d’une évolution naturelle des usages qui mène petit à petit à des choix de conception finalement très éloignés du modèle de départ (cf. ces articles publiés en 2019 : Sommes-nous à la veille d’un nouveau paradigme numérique ? et De nouveaux usages numériques requièrent de nouveaux terminaux).

À une époque pas si lointaine, les fabricants d’ordinateurs essayaient de nous faire croire qu’avec un ordinateur équipé d’un processeur plus puissant, les utilisateurs seraient plus efficaces, plus productifs. Avec le temps et l’évolution des besoins, nous passons d’une recherche de performance et de capacités (vitesse de processeur et stockage) à une recherche  de confort d’usage (mobilité) et de solutions (collaboration de proximité, aide à la décision…). Ainsi la tendance en matière d’équipement est aux terminaux hybrides : How sustainability and hybrid work has become a part of computer design.

Signe des temps : les besoins évoluent et se chevauchent. Il n’y a ainsi plus les créatifs d’un côté (team Photoshop) et les gestionnaires de l’autre (team Excel), les deux rôles se confondent avec les méthodes agiles et ses product owners.

Les différentes responsabilités d’un product owner

Est-ce qu’un product owner fait du meilleur travail avec un ordinateur équipé d’un processeur Intel Core i9 plutôt que i7 ou i5 ? Je pense que nous sommes tous d’accord pour dire que ça n’a rien à voir. Encore une fois, la priorité des entreprises est la recherche d’autonomie des équipes et des individus, le tout dans un contexte de mobilité (télétravail), d’agilité (faire face à l’incertitude) et de sobriété (limiter l’impact environnemental).

De ce côté-là, je constate des réflexions intéressantes chez HP, mais qui restent timides sur l’évolution de l’ordinateur : Les règles ont changé, bienvenue dans le nouveau mode de vie hybride. Signalons également des offres de virtualisation, mais pas de quoi révolutionner les façons de travailler : HP Anyware.

Si les offres proposées sont encore fortement ancrées dans le XXe siècle, il y a néanmoins une évidente prise de conscience chez les fabricants que le marché s’est déplacé. Ainsi, lors du dernier CES, nous avons pu constater que la nouvelle coqueluche des constructeurs est le edge computing avec des machines équipées de puces dédiées à l’intelligence artificielle pour faire tourner des modèles en local : With PC sales down, laptop makers turn to services. Un point de vue partagé par Microsoft qui a fait de l’IA son nouveau cheval de bataille : ‘AI is going to reinvent how you do everything on Windows,’ says Microsoft’s Windows boss.

L’IA sera-t-elle la planche de salut des fabricants d’ordinateurs ? Peut-être, mais il ne leur suffira pas d’en vanter les mérites pour inciter les entreprises à renouveler leur parc, car les entreprises doivent maintenant faire face à l’impératif du développement durable. Il n’est donc pas question de bazarder les vieux PC et de les remplacer illico par des ordinateurs de “nouvelle génération” pour pouvoir bénéficier de l’aide (soi-disant) inestimable des modèles génératifs (cf. La révolution des IA génératives n’aura pas lieu, ou pas comme on essaye de nous la vendre).

Certes, des progrès manifestes sont réalisés en matière de recyclage des équipements informatiques, notamment par HP pour les PC et cartouches d’encre (Impact durable), mais l’impulsion ne viendra pas du renouvellement du parc informatique. Ce dont les entreprises et organisations ont besoin, c’est d’une révolution organisationnelle et culturelle pour qu’elles puissent s’adapter aux contraintes de la permacrise et aux nouveaux défis du XXIe siècle.

Il faut réapprendre à travailler, donc désapprendre les mauvaises habitudes du XXe siècle, celles qui ont mené à la sur-utilisation des emails, des fichiers, et maintenant de la visioconférence.

Changer l’environnement de travail, pas (que) les ordinateurs

J’ai déjà eu de nombreuses occasions de vous expliquer que la donnée est le moteur du XXIe siècle pour des entreprises en quête d’efficience : La performance d’une entreprise dépend de sa capacité de traitement des données. Oui, mieux maitriser la donnée est une condition nécessaire, mais pas suffisante, car dans l’absolu, les entreprises travaillent avec la donnée depuis des décennies, notamment grâce aux outils décisionnels.

Nous avons maintenant une meilleure appréhension de la donnée dans toute sa globalité, et de l’intérêt que représente la collecte, le traitement et l’exploitation des données non-structurées dans une entreprise ou organisation (Données structurées ou non structurées : ce que les entreprises doivent savoir).

Encore une fois, il n’est pas tant question d’outillage que de pratiques et de culture, car basculer les fichiers et applications dans le cloud ne fait que déporter le problème : La bataille du cloud se gagnera bureau par bureau. Ce dont les collaborateurs ont besoin, c’est d’un environnement de travail léger et souple pour pouvoir simplifier l’accès à un ensemble d’informations / connaissances / données et faciliter la communication / collaboration… (cf. Quel modèle de collaboration et de cohésion à l’heure du télétravail hybride (et des crises / guerres) ?).

Si je devais illustrer l’évolution de l’outil informatique et des pratiques, je dirais qu’il est passé par trois grandes phases : l’informatique locale, l’informatique en ligne et l’informatique distribuée).

Par “informatique distribuée”, j’entends distribution des applications / données / connaissances, pas architecture distribuée avec la blockchain. Ainsi, dans ce troisième stade d’évolution, la priorité est d’extraire les informations et données des fichiers et applications dans le cloud pour créer des bases de connaissances accessibles au sein d’un environnement numérique unifié qui favorise le partage et la capitalisation, pas qui incite à produire toujours plus de fichiers.

Nous assistons ainsi depuis plusieurs années à la montée en puissance progressive de la notion de digital workplace, l’environnement numérique de travail en langue de Molière (Futur du travail : parler moins pour mieux collaborer et produire plus).

Je précise bien “montée en puissance progressive”, car malheureusement même si les solutions progressent régulièrement (cf. le panorama Lecko : État de l’art de la transformation interne des organisations en 2023), il y a encore de nombreux défis informatiques à relever, notamment l’intégration ou encore l’authentification unique.

Il y a également un autre problème : la dette numérique, celle qui paralyse les entreprises et organisations (La dyspraxie numérique est un frein majeur à votre transformation digitale). Certes, le confinement a forcé les collaborateurs à modifier leurs habitudes et à s’organiser différemment pour pouvoir faire du télétravail, mais les vieilles habitudes reprennent le dessus et l’élan initial se heurte à la culture informatique (emails + fichiers).

Voilà pourquoi il est si compliqué de définir et de mettre en oeuvre de nouvelles façons de travailler : même si tout le monde est d’accord sur le constat, notre conditionnement culturel nous pousse à nous raccrocher à ce que nous connaissons et maitrisons : les ordinateurs traditionnels. Nous ne voulons pas en changer, car il y a une très forte appréhension du changement lié aux nouveaux outils numériques (IA, blockchains, métavers…), aux nouvelles pratiques (inbound marketing, no-code…) ou aux nouvelles méthodes (agilité, visual planning…). Les facteurs limitants ne sont pas les outils ou terminaux, mais bel et bien la culture d’entreprise et la maturité numérique : Cracking the Culture Code for Successful Digital Transformation.

Et sinon, c’est quoi le rapport avec les ordinateurs et imprimantes ?

Un symbole plutôt qu’une nécessité

Bon OK, j’ai conscience que démarrer un article avec l’histoire des premiers ordinateurs personnels et l’achever avec la nécessité de renouveler la culture pour réussir sa transformation digitale n’est pas le cheminement le plus limpide.

Néanmoins, j’espère vous avoir démontré que les ordinateurs étant au service des collaborateurs et donc du travail qui leur est demandé, si l’on change la demande il faut également penser à changer les outils. D’où cette longue et tortueuse réflexion sur l’évolution de l’informatique, de l’entreprise, du travail…

Moralité : Avons-nous encore besoin des ordinateurs et imprimantes ? Oui et non, la question est plus de savoir comment faire rapidement évoluer les habitudes et méthodes de travail, notamment pour abandonner la logique de productivisme et s’approprier celle de la sobriété : faire mieux avec moins. Par où commencer ? Je n’ai aucune certitude à ce sujet, mais mon intuition me pousse à penser que la remise en question du rôle et de la place des ordinateurs et imprimantes est un bon point de départ pour sortir les collaborateurs de leur léthargie.

La solution est-elle de tout plaquer pour se mettre en freelance et adopter la vanlife ? Non, mais ce n’est certainement pas en faisant perdurer les habitudes et mentalités du XXe siècle qu’on va s’en sortir.



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