L’économie des paris sportifs en ligne est un secteur dynamique, façonné par une croissance exponentielle et une diversification des acteurs ces dernières années, comme le montrent l’engouement et l’agitation des plateformes au moment de grands événements sportifs. Ainsi, lors de la dernière coupe du monde de football en 2022, 615 millions d’euros ont été misés sur les applications françaises. La finale France-Argentine a brassé à elle seule 55 millions d’euros de mise. La médiatisation croissante des événements sportifs joue un rôle majeur en offrant une visibilité accrue aux opérateurs de paris et en créant un terreau fertile pour des campagnes publicitaires ciblées.
Avec l’avènement d’Internet, ce marché des paris est passé d’une situation de quasi-monopole (PMU / FDJ) à une concurrence accrue entre de nombreux opérateurs, avec la légalisation des paris en ligne en 2010. Cette évolution a conduit à une croissance significative des mises, avec des opportunités de paris désormais disponibles 24 heures sur 24, offrant ainsi un niveau de confort et d’accessibilité inégalé aux joueurs. Pierre Rondeau nous rappelle que “l’économie du numérique a révolutionné le secteur. Lors de l’ouverture à la concurrence on aurait pu penser que le marché allait s’autoréguler, conduisant à une concurrence pure et parfaite des différents acteurs, mais le marketing numérique agressif des opérateurs a créé une situation d’oligopole. Ce marketing digital (pub, push up, notifications etc) a créé une captation de l’attention. C’est vraiment grâce au numérique que ces principaux acteurs du paris sportifs se sont imposés sur le marché“. Marie Trespeuch ajoute “le numérique offre également la possibilité de s’adresser directement aux joueurs via des notifications, avec des publicités spécifiquement ciblées, ce qui crée une séduction importante. Les incitations telles que la mise en avant de bonus jouent un rôle clé dans l’attrait du jeu en ligne. Il existe aussi le principe du cashback : se voir rembourser sa mise de départ, même s’il faut faire un premier dépôt quoi qu’il arrive. Par exemple, la promesse de se voir rembourser 50 euros peut susciter l’envie de jouer en créant l’impression que l’argent n’est pas réellement perdu”.
Des jeunes passionnés de sport aux amateurs de jeux de hasard, le marché attire une diversité de publics. Néanmoins, la plupart de ces parieurs sont issus de la jeunesse populaire, particulièrement sensible aux publicités des opérateurs mais aussi plus vulnérables à l’engrenage du jeu et de l’addiction. Isabelle Falque Pierrotin nous explique “on sait que le parieur sportif en ligne type est un homme, jeune, qui habite en milieu urbain. Il faut rappeler qu’on ne peut pas gagner sa vie avec les paris sportifs. Selon une étude réalisée en 2021 à partir des données de ANJ sur l’ensemble des joueurs (environ 3,2 millions de personnes), seuls 1 280 joueurs avaient gagné plus de 10 000€ en un an, soit 0,03% de la totalité des joueurs“. Des questions centrales, telles que la limitation de la publicité, des incitations financières ou encore la prévention des comportement excessif sont au cœur de l’encadrement de ce secteur qui compte aujourd’hui environ 4 millions de joueurs.
Pour aller plus loin
- Pierre Rondeau : Les tabous du foot (éd. Solar, 2019)
- Pierre Rondeau : Le grand footoir. Les dérives du football racontées en 15 matchs, (éd. Solar, 2022)
La Question du jour
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Références sonores
- Lecture texte La richesse des nations, Adam Smith, 1773
- Archive INA Premier tirage du loto sportif, Inter actualité, 13/04/1985
- Paris sportifs, Les pieds sur terre, France Culture, 12/04/2022
- Archive INA Jeux, argent et dépendance, Envoyé spécial, la suite, France 2, 26/06/2010