Ce que l’IA générative peut apporter à la relation client : l’exemple de Castorama



Les enjeux


  • Grâce à des outils qui reproduisent la relation avec un vendeur en magasin, l’IA générative peut augmenter la conversion en ligne.

  • Des solutions d’automatisation du service client permettent de répondre instantanément au consommateur tout en réduisant les coûts opérationnels.

  • L’IA générative peut également être utilisée pour générer des contenus personnalisés afin de booster l’engagement consommateur.


Les limites


  • Le potentiel est immense mais les outils d’IA générative peuvent encore faire des erreurs.

  • Une réflexion est nécessaire autour de l’impact de ces solutions sur l’emploi.


C’est une technologie dont on ne cesse de parler depuis l’arrivée de ChatGPT fin 2022 : l’intelligence artificielle générative. Capable de générer du contenu nouveau en réponse à des requêtes en langage naturel, elle a sans aucun doute un rôle à jouer au service de la relation client. Pour Éric Dadian, président de l’Association française de la relation client (AFRC), il s’agit même de « la plus grande révolution des trente dernières années ».


L’une de ses forces réside dans sa capacité à recommander aux e-consommateurs des produits en fonction des envies qu’ils expriment avec leurs propres mots. Il suffit, par exemple, de taper dans la barre de recherche d’Amazon ou de Walmart « choses que je devrais emporter pour aller faire du camping » pour que le site affiche duvets, couteaux suisses, lanternes solai­res… C’est ce que l’on ­appelle l’aide au shopping virtuel.


En France, les distributeurs misent plutôt sur les chatbots augmentés, qui formulent aussi­ des recommandations, mais avec lesquels il est possible de converser. Castorama a lancé le sien, Hello Casto, au printemps. « Notre volonté était de retranscrire la qualité du conseil et de l’échange proposé par un collègue spécialiste en magasin physique », souligne Romain Roulleau, directeur digital, marketing et clients. « Pour que ce conseiller virtuel soit le plus pertinent possible, nous l’avons notamment nourri de nos documents de formation vendeur. »


Les chiffres 


  • 62 % des Français sont insatisfaits du temps d’attente lorsqu’ils contactent un service client

  • 61% des Français seraient favorables à la généralisation des chatbots à condition que les demandes complexes soient aiguillées vers des conseillers humains


Source : sondage Odoxa pour Kiamo, novembre 2023


Assistance aux vendeurs


Nous avons testé ce vendeur d’un nouveau genre : « Il y a de la moisissure dans ma salle de bains, je ne sais pas quoi faire. » Il nous répond qu’il est désolé de l’apprendre et que c’est un problème courant dans ces pièces en raison de l’humidité. Puis il nous recommande plusieurs produits disponibles chez Castorama, sur lesquels il est possible de cliquer pour accéder au site web classique.


Le chatbot Hello Casto mène aujourd’hui 100 000 interactions comme celle-ci environ par mois d’après l’enseigne, dont le site enregistre entre 10 et 15 millions de visites mensuelles. « Nous estimons que les conversations qui ont lieu sur Hello Casto contribuent à 10 % de notre chiffre d’affaires e-commerce », se réjouit Romain Roulleau. Ce type d’outils peut aussi­ avoir son utilité en magasin, en aidant les vendeurs à affiner leurs conseils, particulièrement s’ils débutent ou si les références sont très nombreuses. Chez ­Castorama, les conseillers s’y réfè­rent en effet lorsqu’ils connaissent moins certaines catégories de produits.


Si elle peut assister le processus d’achat, l’intelligence artificielle générative peut également optimiser les services clients, en allant jusqu’à mimer une partie du travail des agents. Certains outils sont directement en contact avec le consommateur, à l’oral (avec des callbots comme celui développé par Diago) ou à l’écrit, avec une promesse forte : des réponses instantanées 7 j/7, 24 h/24. C’est pourquoi le distributeur d’articles de sport Lepape travaille sur un chatbot capable de répondre aux demandes simples et répétitives, telles que « Où est mon colis ? », ou « Pouvez-vous me renvoyer ma facture ? ».


Pas de délégation à 100 %


Alexandra Dubar, responsable du fonds dédié au futur du commerce créé par la société d’investissement Daphni, a eu l’occasion d’échanger avec plusieurs marques et distributeurs. Pour elle, ces outils restent des copilotes : « Les ensei­gnes ne sont pas prêtes à déléguer à 100 % le customer support, dans la mesure où c’est un élément crucial de l’expérience client. L’IA générative vient seulement l’optimiser pour le moment. » Le risque est de voir son bot reproduire des biais cognitifs problématiques ou halluciner et répondre à côté. C’est ce qui est arrivé à la compagnie Air Canada, « qui a été considérée comme responsable de l’erreur de tarification commise par son chatbot et condamnée à indemniser l’un de ses clients », rappelle Éric Dadian.


Par ailleurs, « la majorité des clients ne veulent pas interagir avec des bots, ils acceptent l’intelligence artificielle si on leur laisse la possibilité d’interagir avec un humain ensuite ». Malgré ces réserves, l’IA générative aura forcément un impact en matière d’emploi, pense le président de l’AFRC. « Des emplois vont évidemment être détruits ou transformés. Il va falloir aider les salariés à retravailler leurs compétences. Néanmoins, je pense que c’est une chance pour revaloriser notre secteur. » Les conseillers clientèle pourraient, par exemple, à l’avenir se consacrer aux réclamations nécessitant une plus grande empathie.


Chez Lepape, le déploiement d’un chatbot permettra aux agents de « se focaliser sur les requêtes qui ont vraiment besoin d’une assistance humaine. L’objectif final, c’est que ces équipes puissent faire de l’upsell [vente incitative d’un produit plus cher, NDLR] et que, finalement, le service client devienne non plus un centre de coût, mais un centre de profit », projette Clément Dubois, son chief marketing officer (CMO).


Pour davantage de rapidité, certaines solutions – comme celle de la start-up Klark – se branchent au système de gestion de tickets et suggèrent aux agents des réponses préconstruites, qu’ils n’ont ensuite qu’à relire et éventuellement compléter ou corriger. De tels outils pourraient se révéler d’autant plus utiles que, selon Éric Dadian, les canaux d’interaction client ne vont pas se réduire au profit des nouveaux chatbots, mais bien se multiplier.


Un écosystème naissant de prestataires très riche


« L’intégration de l’IA générative dans les stratégies de relation client étant un sujet clé actuellement pour les marques et les distributeurs, beaucoup de start-up s’y sont positionnées », remarque Alexandra Dubar, responsable de la section futur du commerce du fonds d’investissement Daphni. Klark, Klaviyo, Dialog, Loop, Brainfish, Parloa… Elle en a recensé une grosse centaine pour de nombreux cas d’usages.


Sur le segment des interactions sur les réseaux sociaux, Alexandra Dubar rappelle que « le but est d’interagir le plus naturellement possible, de la manière la plus personnalisée ». Wax propose, par exemple, une solution de marketing proactif sur WhatsApp, et Drop se spécialise sur le social commerce en DM Instagram. Par ailleurs, « l’IA générative peut aussi être utilisée pour collecter des feedbacks consommateurs déstructurés, les analyser et les synthétiser pour en faire des recommandations pertinentes », note l’experte. C’est ce que permettent notamment l’acteur traditionnel SurveyMonkey et le plus jeune, Vitally.


Newsletters personnalisées


Afin d’investir au mieux toutes ces voies de communication, l’IA générative offre la possibilité de créer des contenus et des communications marketing sur mesure. « Dans un contexte où le consommateur est de plus en plus sollicité, il faut être capable de s’adresser à lui de manière personnalisée, avec le message le plus percutant possible », souligne le CMO de Lepape.


Alors que les mails ont longtemps été considérés comme des spams, le groupe a donc recours à la solution Marketing Cloud de Salesforce, dont il était déjà client, pour personnaliser ses newsletters hebdomadaires depuis l’été 2023. L’objet, les produits mis en avant, les accro­ches… « On va même jusqu’à personnaliser l’heure à laquelle on envoie la newsletter à chacun en fonction de l’horaire à laquelle vous êtes le plus susceptible de l’ouvrir », précise Clément Dubois. Le distributeur a depuis observé une augmentation de 5 points du taux d’ouverture.


L’article est issu de l’édition du 28 novembre 2024 


UNE LSA 28/11


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