Comment fédérer des équipes commerciales à distance


Comment insuffler une culture d’entreprise commune et manager des équipes réparties sur de nombreux sites en régions ? La problématique, déjà ancienne, s’est accrue avec le télétravail : à la distance géographique s’est ajoutée la difficulté à réunir des équipes en un même temps et en un même lieu. La consolidation de la culture de l’entreprise est pour 2025 toujours la deuxième priorité des DRH, selon l’étude réalisée par le département recherche de la société de conseil Gartner, qui recommande aux « dirigeants (de) s’efforcer de rapprocher et de faire adhérer les collaborateurs à la culture, en donnant aux équipes les moyens de créer des microcultures vivantes et saines ».

Ce modèle de « microcultures » locales est celui développé par des nombreuses entreprises du secteur de la communication qui disposent d’équipes réparties dans l’ensemble des territoires. Solocal, l’agence de marketing digital qui gère notamment les Pages jaunes, compte 1700 conseillers digitaux, répartis entre le siège à Boulogne-Billancourt et ses six centres régionaux (qui regroupent télévendeurs et commerciaux terrain), sans compter sa webfactory à Angoulème (300 personnes). « Depuis neuf mois, avec le changement d’actionnaire [Ycor, la holding familiale de Maurice Lévy a pris le contrôle de Solocal en juillet 2024], nous avons renforcé la proximité entre les salariés du siège et les équipes locales », rappelle Jean-Charles Rebours, DRH de Solocal. « L’agence régionale est le véritable point de ralliement de ces équipes terrain », complète-t-il.

Cette volonté de lien permanent entre le siège et les équipes régionales se manifeste dès le recrutement de nouveaux collaborateurs (150 commerciaux et 120 télévendeurs en moyenne chaque année). Après deux semaines de formation, principalement en e-learning, ceux-ci viennent passer 3 à 4 jours à Boulogne pour reprendre en face à face ces acquis avec des formateurs, mais surtout pour rencontrer les équipes centrales (direction, RH, formation, support technique, etc.). « Il s’agit de développer l’esprit de groupe, souligne Jean-Charles Rebours. Nous devons nous assurer que notre entreprise forme un tout et non pas l’addition d’un siège social parisien d’un côté avec sept directions régionales et une multitude de commerciaux isolés dans la voiture de l’autre. »

Même soucis de proximité avec les équipes locales chez Médiaposte. L’entreprise est en pleine mutation depuis le transfert, début 2024, de l’activité de distribution de prospectus et des 3500 salariés concernés au groupe La Poste. Ne comptant plus que 200 collaborateurs, dont la moitié répartis sur 48 sites locaux, il a fallu revoir l’organisation du travail. « Dans le cadre de cette réorganisation, nous avons tenu à être présent au plus près des territoires. Si nous avions regroupé toutes nos équipes commerciales à Paris, nous aurions perdu la proximité avec les “sites industriels” et la réactivité pour répondre à nos clients », argumente la DRH Anne-Lise Boucly. « Maintenir le lien entre tous les Médiapostiers répartis sur l’ensemble du territoire est un enjeu fort pour nourrir notre culture d’entreprise autour de nos valeurs communes », indique le rapport RSE de l’entreprise publié en septembre dernier. « Fédérer ces hommes et ces femmes aux parcours variés, issus de métiers différents, est une priorité pour Médiaposte. Nous y parvenons grâce à la mise en place de dispositifs de communication adaptés à nos publics, à leurs besoins et à notre feuille de route stratégique. »

Entre visio et présentiel

Dans le cadre de cette réorganisation, un comité de pilotage regroupant une cinquantaine de « managers stratégiques » se réunit régulièrement en visioconférence et deux fois par an en présentiel afin de faire le point sur les projets stratégiques et de recevoir en direct les informations du comex. L’organisation territoriale, assez classique (3 grandes régions, regroupant 3 à 5 zones) est structurée autour de réunions mensuelles, principalement en visio-conférence, afin de réduire les coûts liés au transport, mais aussi pour tenir les « engagements de réduction de (l’)empreinte carbone », explique Anne-Lise Boucly. Le parcours d’intégration et de formation des nouveaux collaborateurs est un mix entre formation à distance et en face à face avec les formateurs présents dans certaines des agences locales.

Les grandes agences de communication, comme Publicis (qui dispose de douze sites en région, dont l’important campus 5.9 à Lille), Havas ou TBWA, ont récemment redéveloppé leur implantation régionale en France. Elles s’inscrivent elles aussi dans cette démarche de panachage entre outils numériques et proximité territoriale pour piloter leurs équipes. « Nous avons intégralement revu notre organisation pour déployer un management moins vertical, plus matriciel », expliquait à Stratégies Nicolas Carigliano, directeur général de Publicis Media Connect à l’occasion de ce redéploiement. « Désormais, les experts métiers sont toujours rattachés hiérachiquement à leur directeur d’agence, mais peuvent être sollicités par des pilotes de projets basés à Paris, Lyon ou Rennes. » Afin de montrer l’exemple de cet ancrage régional, le comité de direction de l’agence est réparti sur les trois sites.

Si ces entreprises ont su fédérer des équipes géographiquement dispersées, elles doivent aussi répondre à de nouveaux enjeux : Comment maintenir l’engagement des collaborateurs à long terme ? Et comment favoriser l’innovation malgré la distance ?



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