L’intelligence artificielle, un nouvel horizon pour les Industries culturelles et créatives


Consciente des transformations induites par l’IA, la Fédération des Industries culturelles et créatives (FICC), en collaboration avec la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) et avec le soutien de l’Union européenne, a organisé récemment une rencontre-débat pour explorer l’impact de cette technologie sur les industries culturelles et créatives (ICC). L’événement a réuni des acteurs majeurs du secteur, avec comme invité principal Nadim Sadek, entrepreneur irlando-égyptien et fondateur de Shimmr AI, une entreprise spécialisée dans l’intégration de l’IA dans le marketing digital et la création de contenus immersifs. À travers son intervention, il a mis en avant l’influence croissante de l’intelligence artificielle dans la création artistique et la diffusion des œuvres culturelles. Il a également souligné l’importance d’une approche éthique afin de garantir que l’IA demeure un outil au service de la diversité et de l’innovation.

Daniele Dotto, chef de délégation adjoint de l’Union européenne au Maroc, a insisté sur le rôle fondamental de l’IA dans le renouvellement des ICC. Selon lui, cette technologie facilite l’accès à la culture, permet la production de contenus innovants et crée de nouvelles opportunités économiques, notamment pour les jeunes talents. Cependant, il a également mis en garde contre les défis qu’elle soulève en matière de propriété intellectuelle et de préservation du patrimoine culturel.

Dans le même esprit, Neila Tazi, présidente de la FICC, a souligné que l’essor des ICC au Maroc repose sur une transformation numérique maîtrisée, qui doit s’accompagner d’un cadre structurant pour éviter une standardisation des créations. Elle a appelé à une collaboration accrue entre les artistes, les experts en IA et les institutions pour garantir une intégration harmonieuse de cette technologie dans les pratiques culturelles.

À travers cette initiative, la FICC affirme son rôle de catalyseur dans la modernisation du secteur culturel marocain. En encourageant le dialogue entre créateurs, entrepreneurs et décideurs, cette rencontre-débat a permis de poser les jalons d’une réflexion collective sur l’avenir des ICC face à l’essor de l’intelligence artificielle.

Neila Tazi, présidente de la FICC : «Pour concrétiser nos ambitions, nous devons nous entourer des meilleures expertises et expériences dans le domaine de l’IA»

«L’intelligence artificielle bouleverse le monde à un rythme effréné, imposant une adaptation rapide et réfléchie. Au Maroc, les Industries culturelles et créatives (ICC) connaissent un essor soutenu, porté par la volonté conjointe des pouvoirs publics, du secteur privé et des acteurs du domaine. Pour concrétiser nos ambitions et exploiter pleinement notre potentiel, nous devons dès maintenant nous armer des meilleures expertises et nous inspirer des expériences les plus éclairantes afin de nous porter conseil et nous aider à mieux appréhender ces transformations.

Tous les secteurs des ICC, création, édition, médias, cinéma… seront profondément impactés par cette révolution technologique. Consciente des enjeux, la Fédération des industries culturelles et créatives (FICC) a organisé, le 19 février au siège de la CGEM, une rencontre-débat avec Nadim Sadek, multi-entrepreneur cosmopolite irlando-égyptien au parcours remarquable. Spécialiste de la transformation digitale, il a fondé plusieurs entreprises et a accompagné de nombreuses marques et multinationales dans leur adaptation aux mutations du marché.

Je recommande aux passionnés de ce sujet de découvrir son ouvrage “Shimmer, don’t Shake”, qui explore en profondeur la transition numérique dans le monde de l’édition entre autres.»

Un parcours inspirant : Nadim Sadek et l’innovation responsable

Nadim Sadek est un entrepreneur irlando-égyptien reconnu pour son rôle dans l’innovation et le développement entrepreneurial. Fort d’une riche expérience dans la recherche marketing et la gestion d’entreprises, il est le fondateur de Sadek Wynberg Research, une société qui a gagné en notoriété avant d’être acquise par WPP, un des leaders mondiaux dans le secteur de la communication et du marketing.

Son expertise s’étend à divers domaines, allant de la gestion d’actifs à la stratégie d’investissement, et il a eu l’occasion de conseiller plusieurs marques internationales de renom. En plus de ses succès commerciaux, M. Sadek est un ardent défenseur de l’impact social et citoyen, utilisant sa plateforme pour promouvoir un entrepreneuriat responsable et durable. Il soutient des initiatives visant à favoriser l’accès à la technologie et à l’innovation, en particulier dans les pays émergents.

Par ailleurs, M. Sadek a intégré l’intelligence artificielle (IA) dans son domaine de compétence, cherchant à repousser les limites de l’innovation en marketing digital. Il est à l’origine de «Shimmr AI», une initiative avant-gardiste qui révolutionne la publicité en personnalisant les messages marketing en temps réel, selon les comportements et préférences des consommateurs.

En plus de ses réalisations entrepreneuriales, il est l’auteur de «Shimmer Don’t Shake», un livre qui reflète sa vision unique de la vie et des affaires. Ce dernier aborde les parallèles entre l’édition de livres et l’intelligence artificielle, toutes deux sont des manifestations du génie créatif humain. M. Sadek considère que, bien que des inquiétudes légitimes existent concernant l’impact de l’IA sur nos vies et l’édition, il est essentiel d’accueillir son potentiel plutôt que de le craindre.

Son approche privilégie l’innovation et la créativité, cherchant à mettre en lumière des opportunités inexploitées et à offrir un soutien marketing à des titres littéraires qui, auparavant, n’avaient pas bénéficié d’une telle attention. Pour lui, cette démarche est l’aboutissement d’une carrière marquée par un engagement envers la psychologie, l’entrepreneuriat, et l’innovation en intelligence artificielle.

Entretien avec Oussama Elassri, directeur adjoint du Musée Dar Gnawa, qui a développé «Kouyou» la première IA 100% pour la préservation des traditions gnawa

L’intelligence artificielle, un nouvel horizon pour les Industries culturelles et créatives

Le Matin : Pouvez-vous nous présenter «Kouyou» et expliquer comment est née l’idée de ce projet ?

Oussama Elassri : Si je dois présenter «Kouyou» en une seule phrase, je dirais que c’est un pont entre le patrimoine riche de Gnawa et les générations futures. L’idée est née d’une question simple : comment préserver une tradition aussi profonde et spirituelle que celle de Gnawa dans un monde qui change si vite ? Nous voulions créer une innovation qui ne se contente pas de stocker des informations, mais qui rende ce patrimoine vivant, accessible et compréhensible pour tous. Le projet a germé sous l’impulsion de la Vision éclairée de Sa Majesté le Roi Mohammed VI pour un Maroc innovant et connecté, tout en restant ancré dans ses racines. «Kouyou» est le fruit de cette ambition : une technologie marocaine, conçue par des Marocains, pour préserver une part essentielle de notre identité.

Quel a été le rôle du Musée Dar Gnawa dans le développement de cette intelligence artificielle (IA) ?

Dar Gnawa a été le catalyseur de ce projet. En tant que Musée dédié à la culture Gnawa, nous avions déjà une mission de préservation et de transmission. Mais avec «Kouyou», nous avons voulu aller plus loin. Nous avons rassemblé des experts locaux, des ingénieurs, des anthropologues et, bien sûr, les Mâalems gnawi. Notre rôle a été de créer un espace où la technologie et la culture puissent se rencontrer. Nous avons fourni les ressources, les connaissances et surtout, la passion nécessaire pour que ce projet prenne vie.

Quelles sont les principales fonctionnalités de «Kouyou» et comment interagit-il avec les utilisateurs ?

«Kouyou» est conçu pour être intuitif et engageant. Il permet aux utilisateurs d’explorer et de plonger dans l’histoire de cette tradition. Il utilise une interface interactive, basée sur la génération de texte pour rendre l’expérience immersive.

Disponible 24 h/7 j, «Kouyou» peut interagir en temps réel avec une touche personnelle et avec plus de 50 langues.

De quelle manière l’IA parvient-elle à restituer avec précision les subtilités du patrimoine Gnawa ?

L’IA de «Kouyou» a été entraînée sur un corpus unique, notamment des manuscrits historiques, des transcriptions de cérémonies, et des témoignages oraux des Mâalems. Elle est capable de comprendre les nuances dialectales, les expressions spirituelles, et même les émotions qui se cachent derrière les mots. Mais ce qui fait vraiment la différence, c’est la collaboration avec les Mâalems. Leur expertise a permis de calibrer l’IA pour qu’elle ne se contente pas de répéter des informations, mais qu’elle les restitue avec la profondeur et la sensibilité qu’elles méritent.Quels ont été les plus grands défis technologiques et culturels dans la conception de «Kouyou» ?

Les défis ont été nombreux, mais passionnants. Sur le plan technologique, créer une IA capable de comprendre les subtilités du dialecte Gnawa et de le traduire en langage contemporain a été un vrai défi. Il a fallu des mois de travail pour affiner le système. Sur le plan culturel, la difficulté était de respecter l’essence même de la tradition Gnawa. Nous ne voulions pas créer un outil froid et distant, mais quelque chose qui reflète l’âme de cette culture.

«Kouyou» facilite-t-il l’apprentissage des rituels Gnawa pour les nouvelles générations ?

Absolument. «Kouyou» est conçu pour être un outil éducatif. Il rend les rituels Gnawa accessibles et compréhensibles, même pour ceux qui n’ont jamais été exposés à cette tradition.

Comment s’est déroulée la collaboration avec les Mâalems et les chercheurs en anthropologie ?

La collaboration a été au cœur du projet. Les Mâalems ne sont pas seulement des experts, ce sont les gardiens d’une tradition millénaire. Leur rôle a été de nous guider, de valider les contenus, et de s’assurer que «Kouyou» respecte l’esprit Gnawa. Les anthropologues, ont, de leur côté, apporté une perspective académique, en nous aidant à structurer les informations et à les rendre accessibles. Ensemble, nous avons créé un équilibre entre la rigueur scientifique et la sensibilité culturelle.

Hicham Abkari : l’holographie, un outil de préservation culturelle

Si l’intelligence artificielle ouvre de nouvelles perspectives pour la création et la diffusion culturelle, d’autres technologies émergentes, comme l’holographie, offrent également des solutions innovantes pour préserver et transmettre le patrimoine immatériel.

En recréant en trois dimensions des œuvres d’art, des spectacles ou encore des figures historiques, l’holographie permet d’offrir une expérience immersive et interactive au public.

À ce sujet, Hicham Abkari, directeur des Arts au ministère de la Jeunesse, de la culture et de la communication, confie que grâce à l’holographie, nous pouvons préserver des éléments du patrimoine qui risquent de disparaître et les rendre accessibles aux générations futures. Cette technologie est un pont entre tradition et modernité. «Je conçois l’utilisation des hologrammes comme une technique permettant de préserver le patrimoine. Bien que récente, cette technologie visuelle a l’avantage d’être accessible à un certain public, principalement à travers des performances en théâtre ou lors de festivals.

Lorsqu’on parle de performance, cela peut sembler paradoxal, car l’artiste ou la troupe représentée n’est pas physiquement sur scène. Pourtant, il s’agit bien d’une performance, dans la mesure où elle exige la présence de spectateurs et leur offre la possibilité de découvrir un contenu culturel porté par un artiste qui, bien que virtuel, demeure perceptible.

Tout au long de l’histoire, différentes innovations ont permis la transmission du savoir et du patrimoine culturel : la télévision, la vidéo, le CD, et même la photographie au XIXᵉ siècle. Chaque avancée technologique a contribué à diffuser l’art et la culture. L’essentiel reste la sauvegarde et la transmission aux générations actuelles et futures, qu’il s’agisse d’artistes vivants ou disparus.

Il est probable qu’une nouvelle technologie vienne un jour transformer l’holographie, la rendant plus immersive et tangible. Avec l’évolution rapide des nouvelles technologies, on pourrait imaginer des hologrammes encore plus interactifs, peut-être même capables d’être touchés. L’intégration croissante de l’intelligence artificielle ouvre la voie à une fusion entre holographie et IA, permettant ainsi de créer des performances toujours plus réalistes et engageantes».





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