Les secrets bien gardés de ceux qui cartonnent sur Discover [Regards croisés]


Valérie : Sur le site du beignet aux pommes par exemple, on a mis un garde-fou qui va scruter un peu les articles. Il ne va pas revenir dans le détail, mais il va vérifier que si dans le titre tu as des pommes, qu’il y ait des pommes dans le texte, histoire qu’on se retrouve pas avec un truc complètement absurde. Si on parle du plus beau village de France au milieu du Cantal, il faudrait qu’il y ait le nom du village dans l’article, parce que des fois, quand tu utilises l’IA, tu vas te retrouver à la fin de ton article, tu as lu tout l’article et tu te demandes, mais c’est où en fait ? Donc, éviter ce genre de choses qui vont forcément créer de la déception. 

David : La question, c’est est-ce qu’on travaille de manière éthique, mais on n’est pas des journalistes. Nous, on est des trouveurs de failles, des filous. Et j’ai discuté avec ce fameux journaliste [ndlr : Presse traditionnelle vs IA : faut-il choisir un camp ?], et j’ai réussi à le convaincre. Le principal responsable dans tout ça, c’est Google. Parce que si Google, il voulait vraiment vérifier les informations, ils ont les moyens de déployer des algos de détection de véracité. Mais qu’est-ce qui se passe ? On tourne dans un vase clos où finalement Google gagne de l’argent sur le dos des petits éditeurs comme nous, mais nous on ramasse quoi par rapport à Google ? On ramasse que des miettes. On est là pour ramasser quelques miettes parce qu’on est un peu des filous et on profite de failles de chez Google qu’ils pourraient très clairement patcher.

S’il faut s’adapter pour faire de la véracité, on fera de la véracité. Mais tant qu’il y a ces failles-là, on les exploite. On n’est pas journalistes. Autant les journalistes, eux, ils ont vraiment une conscience. On ne va pas retourner le débat, mais il y a des journaux, des médias presse qui attaquent des petits éditeurs comme nous, qui eux sont pires parce que eux, c’est vraiment des journalistes. Ils ne font pas leur boulot de journalistes. Nous, on ne se présente pas comme des journalistes. Nous, on est des petits éditeurs de sites. Et à l’origine, on est SEO, un peu chapeau noir. Et on est finalement des testeurs d’algorithmes.

Evidemment, d’un point de vue éthique, on est dans des thématiques où on fait pas mal à grand monde. On n’est pas sur des thématiques où on va bouleverser la Terre entière. Mais c’est vrai que la véracité de nos informations, ce n’est pas forcément notre prérequis. Notre prérequis, c’est gruger l’algo pour pouvoir faire du trafic. Par contre, s’il y a bien un responsable et quelqu’un à qui on peut s’en prendre dans toute cette histoire de désinformation qu’il peut y avoir, je pense que c’est Google lui-même, très sincèrement. Parce que s’il voulait, il pourrait faire en sorte de faire un meilleur tri, d’améliorer son algo. Ce qu’il se passe, c’est qu’il a fait des sites, qu’il a fait des pubs de chez lui, il gagne de l’argent sur notre dos et nous on en gagne quelques milliers aussi, mais le cercle vertueux, c’est d’abord pour lui.

Clément : Mon principe, c’est que les erreurs que tu vas retrouver dans les articles que nous on va générer pour Discover, donc nous les petits éditeurs, le volume d’articles et l’impact qu’on fait, il est nul. C’est une erreur statistique et on nous embête pour une erreur statistique, c’est-à-dire qu’on est à 0,1%. Ils cherchent l’erreur pour chercher l’erreur. Parce qu’en termes d’impact, c’est nul, c’est zéro. 

C’est un faux débat. Aucun éditeur de site n’est content d’avoir un article avec des erreurs. On veut tous avoir des articles sans erreurs. Sauf que des fois, mettre les moyens humains ou techniques de vérifier article par article, c’est tout simplement pas possible. Ça nous coûterait trop cher. Par contre, sur nos sites, on a des mentions légales et en général, quand il y a une erreur, on peut nous envoyer un mail, on peut nous appeler, on peut se faire engueuler. Et à partir de là, pour moi, il n’y a aucun problème de se tromper dans un article à partir du moment où tu assumes l’erreur. Si je me trompe sur la photo de Gordes parce que je ne connais pas bien, et que dans la section commentaires ou contactez-moi, le maire de Gordes m’appelle et m’insulte en me disant que je suis un gros nul, je dirais que je me suis planté, désolé, je corrige.

David : On a le droit de se tromper.

Clément : La problématique des journalistes aujourd’hui, c’est qu’ils nous accusent avec les hallucinations ou les erreurs, en nous  disant “Vous n’avez pas le droit de vous tromper”. Ce qui en soi est problématique puisque eux, de leur côté, ils se trompent quand même assez régulièrement et je sors toujours la même étude. Il y a une étude aux US qui a été faite sur tous les articles qui avaient des numéros à l’intérieur, qui démontrait que dans la moitié de ces articles-là, il y a des erreurs. Tout le monde se trompe. Moi, ça ne me dérange pas. Les journalistes se trompent, ça arrive. Personne n’est parfait. Il faut juste assumer ce qu’on a publié derrière. Ceux qui n’assument pas, pour moi, ils sont critiquables et condamnables



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