Par
AFP
Publié le
3 juin 2025
La guerre est déclarée: alors qu’une proposition de loi visant Shein et Temu a été examinée lundi au Sénat, une grande majorité des commerçants français se sont alliés pour demander au gouvernement le déréférencement des sites des géants asiatiques.

Les attaques se multiplient devant l’essor fulgurant de ces deux acteurs de l’ultra-fast fashion ou “mode ultra express” et de l’e-commerce, accusés d’incitation à la surconsommation, de pollution environnementale et de concurrence déloyale vis-à-vis des entreprises européennes.
Dernière en date, celle des principaux acteurs du commerce en France, demandant instamment au gouvernement dans une lettre ouverte le déréférencement de ces plateformes, actuellement visées par une proposition de loi (PPL) entendant les réguler.
Lundi, le Sénat s’est longuement penché sur ce texte qui prévoit une interdiction de publicité pour ces entreprises, des pénalités financières, une obligation de sensibilisation des consommateurs à l’impact environnemental de leurs vêtements, etc.
Selon des enquêtes européennes, “85 à 95% des produits proposés sur Temu, Shein et AliExpress ne respectent pas les normes en vigueur dans l’UE”, dénoncent le Conseil du Commerce de France (CDCF) et la Confédération des Commerces de France (CCF), dans un communiqué de presse envoyé mardi à l’AFP.
Lundi, ces deux fédérations représentatives, associées à 14 autres et à plus de 230 enseignes (soit environ 80% du secteur), ont demandé au gouvernement, via la Répression des Fraudes (DGCCRF), d'”engager sans délai une procédure de déréférencement” de Shein, Temu et AliExpress.
Parmi les signataires, figurent notamment King Jouet, Jouéclub et La Grande Récré, alors que la question de la dangerosité des produits pour enfants est au cœur des inquiétudes.
“La loi française donne déjà les moyens d’action”, estiment les deux fédérations signataires, ne semblant pas vouloir attendre la mouture finale de la PPL visant la fast fashion.
Elles ont rappelé que “le Code de la consommation permet à la DGCCRF, en cas de manquements graves et persistants, d’ordonner le déréférencement, la suspension ou même le blocage de l’accès à un site”.
Elles insistent: “un commerçant français qui vendrait 94% de produits non conformes dont 66% pour dangerosité serait fermé sur-le-champ”.
“Nous investissons cette année 13 millions d’euros pour la sécurité et la conformité des produits, dont 2,5 millions de tests de sécurité et de qualité des produits (soit une augmentation de 25% par rapport à l’année dernière)”, a réagi Shein auprès de l’AFP, mettant en avant ses “partenariats avec 15 agences de test reconnues au niveau international”.
Interdiction totale
Lundi, le président de la Fédération du prêt-à-porter féminin Yann Rivoallan avait enfoncé le clou: “Je pense qu’il faut interdire ces sociétés tout court”. “Si ces produits sont dangereux, pourquoi les consommateurs peuvent les acheter?”, s’est encore interrogé M. Rivoallan sur RTL, qui plaide pour une interdiction “ou alors” pour “une taxe comme on a pu le mettre en place aux Etats-Unis”.
Washington avait instauré des droits de douane à 120% en mai, visant les colis venant de vendeurs asiatiques tels Temu, Shein ou AliExpress, désormais réduits à 54%.
Mais pour les acteurs du commerce en France, “la menace n’est pas que sécuritaire”. “Ces plateformes éludent la TVA, échappent aux droits de douane, contournent les périodes de soldes, violent les règles d’étiquetage et de transparence commerciale”, selon la CCF et la CDCF.
Outre les droits de douane américains, la PPL “fast fashion”, les demandes de déréférencement, l’Union européenne tente elle aussi d’endiguer le phénomène.
La Commission européenne a récemment proposé d’imposer des frais de 2 euros sur chaque petit colis entrant en Europe, dont l’immense majorité proviennent de Chine.
Aujourd’hui en France, les grandes plateformes asiatiques représentent 22% des colis acheminés par La Poste, selon le patron du groupe public français, Philippe Wahl, alors qu’elles pesaient “moins de 5% il y a cinq ans”.
Même tendance exponentielle en Europe où en 2024, environ 4,6 milliards d’envois de faible valeur (à 91% en provenance de Chine) sont entrés sur le marché, un chiffre qui a doublé par rapport à 2023 et triplé par rapport à 2022, s’affole la Commission européenne.
Par Ornella LAMBERTI
Paris, 3 juin 2025 (AFP)
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