une fausse bonne idée pour un vrai problème



Alors que le débat autour d’une interdiction de TikTok pour les moins de 15 ans refait surface, la tentation politique est grande de brandir l’âge légal comme solution miracle.

Interdire TikTok, c’est un peu comme retirer le téléphone à un ado sans lui expliquer pourquoi. Ce n’est pas TikTok qui est dangereux, c’est notre manque d’éducation numérique collective. Le problème est ailleurs. Il est dans l’usage, pas dans l’âge.

Interdire TikTok : le réflexe facile mais inefficace

La France découvre la puissance et l’influence massive de TikTok sur toute une génération. A la mi-juin, huit influenceurs étaient auditionnés à l’Assemblée nationale. Addiction, désinformation, atteinte à la santé mentale… TikTok est dans le viseur. Et comme souvent, une proposition refait surface : interdire l’application aux moins de 15 ans.

Sur le papier, la mesure semble protectrice. En réalité, elle agit comme une rustine sur une fracture numérique. TikTok n’est pas la première plateforme à déranger les adultes. MSN, Facebook, Snapchat l’ont précédée. Et demain ? BeReal ? Discord ? Les plateformes changent, les réflexes politiques restent les mêmes : interdire, encadrer, légiférer, souvent sans comprendre les véritables mécaniques d’usage. Même Hugo Décrypte, pourtant modéré dans ses prises de parole, l’a souligné : le problème n’est pas tant dans l’âge minimum que dans notre rapport global aux réseaux sociaux.

Ce n’est pas l’âge qui compte, c’est l’usage

Croire qu’on va résoudre un problème culturel avec une règle technique, c’est mal poser le débat. L’algorithme de TikTok ne fait pas de tri par âge : il pousse ce qui capte l’attention. Et cette attention, nous la nourrissons tous — pas seulement les plus jeunes. TikTok ne rend pas les adolescents addicts. Ce sont les contenus mal conçus, les formats pensés pour capter plutôt qu’élever, et surtout l’absence d’éducation au numérique qui posent problème.

Des alternatives existent. En Chine, la version locale de TikTok impose des limites de temps aux mineurs, valorise les contenus éducatifs. Cela montre bien que l’impact de TikTok dépend de ce qu’on en fait. Nous voyons chaque jour qu’il est possible de divertir sans désinformer, d’engager sans manipuler. L’exigence de fond et de forme n’est pas antinomique avec la performance. C’est même ce qui garantit une performance durable.

Créer du contenu responsable, c’est aussi une stratégie

Chaque vidéo sponsorisée, chaque campagne d’influence contribue à façonner l’écosystème. Les marques et les créateurs ont une responsabilité : celle d’élever le niveau du feed, pas juste de le remplir.

Trop souvent, la priorité reste la performance brute. Pourtant, il ne faut pas choisir entre engagement et exigence créative. Les contenus qui fonctionnent ne sont pas forcément les plus bruyants, ce sont ceux qui captent l’attention avec sincérité, pertinence et intelligence.

Quand une marque assume ses valeurs à travers un créateur crédible, elle construit plus qu’un pic de vues : elle tisse une relation de confiance. Et dans un monde saturé de contenus, la confiance devient la ressource la plus rare, et la plus stratégique.

La vraie régulation, c’est une responsabilité partagée

Alors que faire ? Interdire, c’est simple. Construire, c’est mieux. L’avenir de TikTok, et plus largement des réseaux sociaux, ne peut reposer sur des mesures isolées. Il faut une alliance collective entre créateurs, plateformes, éducateurs, politiques et marques.

Éduquer les jeunes à un usage éclairé. Encadrer les dérives avec des règles claires. Et surtout, investir dans un contenu qui respecte l’attention autant qu’il la sollicite. TikTok n’est pas le problème. Le problème, c’est notre passivité face à sa puissance.



Source link