Alors que les géants du numérique accélèrent dans la grande course à l’innovation, l’adoption de l’IA générative par les entreprises progresse à un rythme bien plus mesuré. Cette lenteur révèle un paradoxe inquiétant : malgré des promesses de performance et de compétitivité, la défiance et le déficit de compréhension freinent l’appropriation des usages. Pour les organisations, le risque est clair : laisser s’agrandir une fracture numérique qui pourrait peser durablement sur leur efficacité, leur croissance et leur positionnement face à la concurrence. Nous sommes des adultes, il ne nous est pas permis d’ignorer le problème de cette fracture numérique et de faire comme si de rien n’était en propageant les récits fantaisistes de la révolution instantanée de l’IA.

En synthèse :
- L’innovation technologique avance à un rythme effréné, mais l’adoption de l’IA générative par les entreprises et le grand public reste lente et chaotique ;
- Le déficit de compréhension nourrit la méfiance : plus les modèles génératifs progressent, plus la défiance et le rejet se renforcent ;
- Les PME et TPE françaises peinent à percevoir les bénéfices du numérique et de l’IA, freinées par un manque de formation et de confiance ;
- La pression médiatique, entre promesses exagérées et craintes alarmistes, accentue la fracture et brouille la perception des usages et bénéfices réels ;
- Les leviers d’adoption reposent moins sur de nouveaux modèles que sur l’acculturation, la formation et l’accompagnement des salariés et managers.
Comme c’est le cas depuis maintenant presque 3 ans, les annonces de nouveaux modèles génératifs ou de nouvelles fonctionnalités d’IA générative se succèdent à un rythme infernal, dans un cadre général d’affrontement technologique entre les États-Unis et la Chine. Rien que ces 3 derniers jours :

Comme vous pouvez aisément le constater, la machine à innover fonctionne à plein régime. Le problème est que nous ne manquions pas d’innovation, mais plutôt de temps et de volonté pour les intégrer : Des limites de la capacité d’absorption du marché avec l’IA.
Loin de la vague déferlante et transformatrice décrite par les médias et experts auto-proclamés, l’adoption de l’IA générative par les entreprises et le grand public s’avère lente et chaotique. Nous assistons à une collision frontale entre la poussée technologique des éditeurs et la capacité d’absorption réelle d’un marché qui peine à suivre.
Ainsi, plusieurs articles ont été publiés récemment pour décrire un phénomène de ralentissement dans l’adoption de l’IA, ou plutôt une adoption beaucoup plus lente que prévue : AI at Work: Momentum Builds, but Gaps Remain.
Le souci, comme très souvent, est que les études réalisées par de grands cabinets de conseil qui nous annoncent la révolution de l’IA ne respectent pas la rigueur des instituts de sondage : les statistiques qui sont exhibées reposent sur des définitions floues et des questions biaisées. « Utiliser vous l’IA dans votre entreprise ? » ne me semble ainsi pas être une question très pertinente. Mais peu importe, car là n’est pas le problème.
Un problème de confiance qui cache un déficit de compréhension
À la décharge des cabinets de conseil cités précédemment, nous constatons également que les grands médias usent et abusent de sondages biaisés sur l’IA pour pouvoir écrire tout et son contraire, la tendance du moment étant à la défiance : How Americans View AI and Its Impact on People and Society.
L’opinion publique est-elle réellement hostile à l’IA ? Difficile de se prononcer sur cette question en l’absence d’une compréhension effective de ce qu’est l’IA, de la façon dont fonctionnent les modèles génératifs et des usages réels que les utilisateurs font des chatbots qui sont à leur disposition.
En revanche, ce qui est certain, c’est que le rythme d’innovation de l’IA en particulier, et des technologies numériques en général, est trop élevé. C’est ce que nous révèle cette étude menée par Deloitte avec des questions et des réponses plus explicites : In the gen AI economy, consumers want innovation they can trust.

Le sentiment de se sentir dépassé par l’innovation engendre nécessairement une forme de lassitude, ainsi qu’un rejet des technologies que nous ne comprenons ou nr maitrisons pas : L’intelligence artificielle fait peur, surtout à ceux qui ne font pas l’effort de la comprendre.
Il est ainsi beaucoup plus simple de trouver des excuses pour ne pas utiliser ou s’intéresser aux nouvelles technologies (sécurité, confidentialité, souveraineté…) que de chercher à les comprendre et à les adopter. Ce raccourci (« Je n’utilise pas, car ce n’est pas au point« ) s’applique depuis longtemps aux technologies numériques, mais a atteint son paroxysme avec l’IA générative.
Nous sommes maintenant dans une configuration de marché où les innovations sont devenues contre-productives, car tout nouveau progrès des modèles génératifs ne fait que renforcer le sentiment de suspicion et le phénomène de rejet de ces nouveautés.
Plus les technologies progressent, plus on les rejette
Est-il correct de généraliser ce phénomène de rejet des nouveautés technologique au marché français et de surcroît aux entreprises ? Malheureusement oui, car nous avons des statistiques qui confirment cette tendance.
Ainsi, les derniers chiffres du baromètre de la transformation numérique des petites et moyennes entreprises sont tombés, et ils ne sont pas bons : Baromètre France Num 2025 : le numérique et l’intelligence artificielle dans les TPE et PME. Ce baromètre édité tous les ans par le CREDOC, mesure les activités et projets numériques d’entreprises françaises (11.000 entreprises, dont 3.000 PME et 8.000 TPE). Malgré la tonalité très enthousiaste de l’article qui accompagne la sortie de ce nouveau baromètre, j’y détecte des signaux faibles que l’on ne peut ignorer.
Cette étude nous révèle un recul de la perception des bénéfices du numérique (contribution au C.A. et aux résultats) : 78% des sondés perçoivent le numérique comme bénéfique à leur activité (contre 81% en 2022), mais seuls 40% constatent une augmentation du C.A., et 34% une amélioration de la leur marge.

De même, plus de la moitié des sondés ont des craintes relatives à la perte ou au piratage de leurs données, contre 36% en 2020.
Bien évidemment, cette interprétation de la dernière version du baromètre est subjective, propre à ma sensibilité, mais d’autres statistiques me confortent dans cette impression de verre à moitié vide :
- Une perception plus faible de la capacité du numérique à aider les entreprises à se démarquer de la concurrence (38% contre 39% l’année dernière) ;
- Une baisse de la fréquence d’utilisation des médias sociaux pour promouvoir l’entreprise ou ses produits (46% d’utilisation quotidienne en 2025 contre 61% en 2023) ;
- Une part des salariés formés au numérique toujours très faible (20% au cours des 12 derniers mois).
La seule statistique encourageante de ce baromètre 2025 est la forte progression de l’utilisation de l’IA : +13 %. Là encore, nous pouvons légitimement nous poser la question de savoir ce que les sondés mettent derrière les termes « intelligence artificielle » ou « Utiliser des outils d’IA ». Mais dans tous les cas de figure, la part des PME et TPE ayant recours à l’IA reste très faible, pour des usages qui tournent majoritairement autour de la génération de texte ou de la recherche d’information via un chatbot. Pas de quoi célébrer la révolution de l’IA…

Je pense que le coeur du problème, le facteur qui freine l’adoption et limite les usages, est tout simplement la confiance, c’est à dire la confiance limitée que les patrons et salariés de PME accordent à des technologies qu’ils ne comprennent ou ne maitrisent pas bien. Selon cette optique, et partant du fait que personne ne bénéficie d’une formation intensive au numérique ou à l’IA, la stagnation, voir le recul de certains usages numériques ne me surprend qu’à moitié.
Nous avions à ce sujet de premiers éléments de réflexion avec le Baromètre de la confiance des Français dans le numérique publié par l’ACSEL en début d’année : seulement 44% de la population à confiance dans l’utilisation de l’internet (40% en 2015), tandis qu’à peine 38% ont confiance dans les médias sociaux (35% en 2011 et 36% en 2020).

Concernant l’intelligence artificielle, là aussi le niveau de confiance en l’IA stagne depuis de nombreuses années à 53-54%.

Nous avons donc de fortes raisons de penser que la confiance est au coeur de l’adoption et des usages des nouvelles technologies, d’autant plus avec l’intelligence artificielle qui est de loin la technologie la plus complexe et la plus obscure.

Si vous suivez ce blog depuis ses débuts, alors vous savez déjà que j’ai toujours été enthousiaste au sujet des nouvelles technologies. C’est d’ailleurs la raison qui m’a poussée à commencer à publier des articles : décrypter les usages et technologies numériques pour en faciliter l’adoption.
Je constate néanmoins que l’emballement du marché pour l’IA générative commence à avoir des effets négatifs dont nous ne mesurons pas les conséquences profondes. Je ne suis ni économiste, ni sociologue, mais je pense ne pas me tromper en écrivant que ce déficit de confiance envers les nouvelles technologies, et l’IA en particulier, ralentit l’adoption et pénalise les usages numériques, donc les ressources qui y sont associées, donc les emplois.
Pourtant, les macro-indicateurs socio-techno-économiques sont bons, car la transformation numérique de la France est alignée avec les objectifs fixés par l’UE : France 2025 Digital Decade Country Report.

N’allez pas penser que cette lenteur à l’adoption de l’IA est une particularité française, car on retrouve un déficit de confiance équivalent aux États-Unis : How Americans View AI and Its Impact on People and Society.
Peut-être que cette tension trouve ses origines dans le double discours des médias qui prennent un malin plaisir à souffler le chaud et le froid, en relayant à la fois les discours ultra-optimistes des éditeurs et les craintes ou réticences des entreprises et utilisateurs.
Une pression médiatique toujours plus forte
Il ne vous aura pas échappé que les journalistes et rédacteurs sont parmi les professions les plus exposées au risque de remplacement par l’IA générative. Je ne sais pas si c’est un réflexe de survie ou une vengeance par anticipation, mais les médias se délectent des chiffres-chocs et avis tranchés sur les risques que font peser les IA sur l’emploi :
Si je ne remets absolument pas en cause la véracité de ces chiffres et avis, je suis en revanche beaucoup plus sceptique sur les conditions de collecte, donc les questions posées pour récolter ces chiffres et avis. Dès que l’on s’y intéresse de près, il ne faut pas longtemps pour déceler les ressorts éditoriaux dont les médias usent et abusent pour capter l’attention. Des pratiques déjà dénoncées dans un précédent article (Col blancs et IA générative : entre promesses d’augmentation et risques de substitution).
Pourtant, nous avons le recul pour comprendre que le tant redouté remplacement par l’IA est une fable, car la réalité du terrain est tout autre. Ainsi, la radiologie nous a été présentée il y a quelques années comme une profession au bord de l’extinction, tant les progrès des modèles de reconnaissance visuelle étaient fulgurants. 10 ans après, nous réalisons que l’analyse des radios ne représente qu’une petite partie du travail des radiologues, et que les interprétations des résultats menant à des décisions médicales prennent en compte d’autres facteurs (ex : l’âge des patients, leurs antécédents, leur combativité face à la maladie…). La Société Savante de Radiologie Américaine déplore même les grandes difficultés à recruter des radiologues (AI isn’t replacing radiologists.), un comble !

Pour clarifier les enseignements que nous pouvons tirer de l’exemple des radiologues, j’utilise dans mes formations l’analogie du photographe : il faut 1/4 seconde pour appuyer sur le déclencheur d’un appareil photo, mais des années pour acquérir les compétences nécessaires à la réalisation de belles photos (le fameux « oeil » du photographe professionnel).
Tout comme les appareils photos numériques et smartphones n’ont pas remplacés les photographes, les IA (symboliques, statistiques, probabilistes…) ne vont pas remplacer les salariés, mais leur simplifier certaines tâches. Cette révélation en amène une autre : les gains de performance promis par les techno-prophètes seront beaucoup plus complexes à gagner que ce qu’essayent de nous faire croire les éditeurs et consultants. Dire que l’IA va améliorer la compétitivité des entreprises est un peu comme dire que le développement durable va atténuer les effets du dérèglement climatique. Nous sommes tous d’accord pour croire en cette assertion, mais de nombreuses divergences apparaissent dès qu’il est question de se mettre d’accord sur un délai et des modalités de réalisation, sur des objectifs et indicateurs, sur les ressources à mobiliser…
Donc la question est réglée ? Non, pas réellement, car même avec de la pédagogie, la confiance est un sentiment complexe qui repose sur un ensemble de critères objectifs et subjectifs. Regagner la confiance du marché est une entreprise titanesque d’autant plus avec des technologies et usages qui évoluent en permanence, littéralement tous les jours.
Et ce n’est que le début…
Ce n’est résolument pas aujourd’hui que nous allons pouvoir trancher sur le fait que l’IA représente un danger ou non pour les salariés. Le problème est que le mal est fait, car les signaux contradictoires relayés par les médias (discours ultra-optimistes des éditeurs vs. craintes existentielles des salariés) ont définitivement sapés le moral et la confiance du marché.
Et non, ce n’est pas parce qu’il y a 1 milliard d’utilisateurs gratuits des chatbots (ChatGPT, Gemini, Perplexity…) que les entreprises et organisations ont accompli la dernière étape de leur transformation numérique en basculant dans l’ère de l’IA agentique. Dans les faits, comme nous venons de le voir, c’est plutôt l’inverse : à chaque nouveau modèle ou nouvelle fonctionnalité, la défiance grandit vis-à-vis de cette intelligence artificielle qui fascine autant qu’elle effraie.
Et pendant ce temps-là, les géants numériques sont lancés dans une folle course à l’innovation avec des nouveaux usages potentiels toujours plus surprenants, à l’image de ce fil d’actualité concocté tous les jours par ChatGPT en fonction des informations et notifications collectées par le chatbot, par une application pour générer des hyper-trucages de vos amis, ou par ce flux de contenus synthétiques bientôt proposé par Facebook et Instagram :

Les plus observateurs apprécieront le fait qu’OpenAI présente sa nouvelle fonctionnalité « Pulse » comme une innovation disruptive, alors que ce n’est qu’une ré-interprétation du Copilot Daily de Microsoft ou de ce que proposait Google Now en 2012.
Toujours est-il que la fracture numérique s’élargit à mesure que de nouveaux usages s’installent, avec d’un côté, les techno-retardataires qui hésitent encore à stocker leur fichier dans le cloud ; et de l’autre, les adopteurs précoces qui ne jurent que par les agents intelligents. Le réel drame de cette fracture est qu’au-delà des conséquences sur l’emploi, la croissance des usages de l’IA générative va avoir un impact bien réel pour tous les citoyens, même ceux qui n’utilisent pas l’IA : How data centers are sending power bills soaring.
Cette augmentation de la facture d’électricité n’est que la première conséquence indirecte visible, car je vous rappelle que des centaines de milliards de $ ont déjà été investis dans les infrastructures servant à faire tourner les IA générative, des centaines de milliards de $ qui ne seront pas investis ailleurs par des sociétés dont les actionnaires exigent de rentabiliser les investissements au plus vite, donc de faire pression sur le marché, donc de délivrer un discours optimiste, voir alarmiste pour stimuler l’adoption. La boucle est bouclée…
Et ce n’est que le début, car l’IA générative ne fait que prendre son envol, avec des besoins croissants en puissance de calcul, donc toujours plus de capitaux investis (OpenAI Needs A Trillion Dollars In The Next Four Years), donc une plus grande nécessité de générer du cash flow pour éviter un endettement trop important (OpenAI’s H1 2025: $4.3b in income, $13.5b in loss), donc une pression sur le marché.
Cette fuite en avant pour tenter de prendre de vitesse les concurrents sur un marché en devenir est une sorte de spirale infernale qui fait peser une énorme pression sur les entreprises, et indirectement sur les salariés qui sont sommés d’adopter au plus vite les nouvelles technologies et l’IA pour pouvoir réaliser les gains de performances promis par les éditeurs.
On marche sur la tête, certes, mais du moment qu’on avance…
Des salariés pressurisés par les experts synthétiques
En y réfléchissant bien, ce qui me chagrine le plus dans cette situation est que le postulat de départ, les gains de performances, ne sont pas garantis, loin s’en faut.
Croyez-le ou non, mais nous constatons aujourd’hui que l’adoption à marche forcée de l’IA générative n’engendre pas des gains de productivité, mais au contraire, la pénalise : Les mauvaises utilisations de l’IA générative nous fait perdre du temps et de l’énergie alors qu’elles sont censées nous en faire gagner (AI-Generated “Workslop” Is Destroying Productivity).
Ce terrible paradoxe nous est révélé par le Media Lab de l’université de Stanford et du cabinet BetterUp qui ont mené une étude auprès de milliers de salariés, dont la conclusion est sans appel : l’utilisation maladroite de l’IA générative favorise la prolifération de documents et messages très bien rédigés, mais vides de sens (le « workslop » par analogie à l’ »IA slop« ), qui font perdre du temps à celles et ceux censés les lire, les valider ou les traiter : Workslop is the new busywork, and it’s costing millions.

J’imagine que vous m’avez vu venir : le problème ici n’est pas l’IA générative, mais la mauvaise utilisation de l’IA générative, donc le déficit de compréhension et l’absence de maitrise. Cette étude vient mécaniquement alimenter la défiance de ceux qui ne veulent pas croire en l’IA, car ils ne la comprennent pas, donc en ont peur, donc la rejette.
Ce phénomène croissant de rejet ou de désintérêt pour l’IA générative est d’autant plus regrettable que les modèles progressent rapidement et s’approchent du niveau de compétences des experts. C’est en tout cas ce que nous révèle cette étude publiée par l’éditeur de ChatGPT : OpenAI says GPT-5 stacks up to humans in a wide range of jobs.

C’est à ce stade de mes explications que vous êtes censés avoir une réaction virulente du type : « Encore une étude fumeuse qui prophétise l’avènement des experts synthétiques, éditée par la société qui fournit justement des outils pour créer des experts synthétiques ??!!?? » Je suis bien d’accord avec vous, et vous n’êtes pas les seuls, car cette étude est fortement décriée par la communauté : AI hits human parity on some jobs, if you believe the benchmark.
Rassurez-vous, je ne vais pas rentrer dans le détail des arguments des uns et des autres, car ça serait une perte de temps et d’énergie.
L’IA est là, il faut faire avec !
Que vous ayez des convictions fortes ou pas, que vous l’utilisiez ou pas, que l’on vous incite fortement à l’adopter ou pas, l’IA générative et les conséquences de sa montée en puissance sont une réalité à laquelle personne ne peut échapper.
Ce qui était vrai pour l’internet ou pour les smartphones il y a quelques années, l’est également pour l’IA aujourd’hui : qu’il y ait un progrès ou non, les transformations qui sont en cours sont inéluctables, à vous d’en tirer profit et non de les subir.
Il n’est ainsi très clairement pas envisageable de faire comme si de rien n’était, de se contenter d’observer de loin l’évolution des usages numériques et de se laisser « porter par le courant ». Comme si l’adoption de l’IA allait être un phénomène naturel. Comme si les salariés allaient spontanément maitriser les prompts et être capables de concevoir leurs propres agents intelligents.
Dans un contexte économique et social aussi tendu, avec une concurrence toujours plus féroce, il est tout simplement impossible de continuer à travailler comme avant, de perpétuer des outils et habitudes de travail hérités du siècle dernier, d’une période complètement révolue (les Trente Glorieuses).
Face à un marché en pleinne réinvention, il y a une obligation à suivre l’évolution et à s’inscrire dans une démarche d’adaptation permanente au changement pour espérer survivre. Ceci passe nécessairement par une intensification de l’utilisation des outils numériques et de l’IA, mais avec une sensibilisation et une montée en compétences préalables.
Vous pourriez me dire que la période ne s’y prête pas, car les entreprises n’ont ni le temps, ni l’argent, ni l’énergie de se transformer, mais c’est justement ça l’origine du problème : des organisations sclérosées par leur rigidité, dont la marge de manoeuvre s’amenuise avec le temps.
Certes, la tâche n’est pas simple, mais tous les grands éditeurs font évoluer leur offre pour faciliter la prise en main et l’utilisation de l’IA générative :
Le vibe working est-il la solution au problème de productivité des entreprises ? Impossible de le dire, mais la promesse est de plus en plus alléchante, car tout est mis en oeuvre pour faciliter la prise en main de ces nouveaux outils.
Tout ce qu’il manque aux entreprises et organisations est l’étincelle qui va leur redonner envie d’investir de l’énergie et des moyens dans les activités numériques et dans l’IA générative, car l’évolution ne se fait que dans un seul sens. Cette étincelle, c’est la formation et l’accompagnement des salariés et managers dans leur appréhension de ce qu’est l’IA et de ce que les modèles génératifs peuvent leur apporter : Nous n’avons pas besoin de meilleures IA, mais d’une meilleure compréhension de l’IA.
Votre plan d’action est donc assez simple :
- acculturer et former ceux qui ne l’ont pas été ;
- mettre à niveau ceux qui ont abandonné en cours de route ;
- stimuler ceux qui sont en responsabilité.
Encore une fois : ce n’est peut-être pas le bon moment, mais ça pourrait être votre dernière chance de monter dans le train et d’achever votre transformation numérique, grâce à l’IA, ou à cause d’elle !
Questions / Réponses
Pourquoi dit-on que l’adoption de l’IA générative est lente ?
Parce qu’il existe un décalage entre la rapidité des innovations annoncées et la capacité réelle des organisations à les intégrer. Les éditeurs enchaînent les lancements de modèles et de fonctionnalités, mais les entreprises manquent souvent de temps, de moyens et de maturité numérique pour transformer ces avancées en usages concrets et productifs.
Quel est le principal frein à l’utilisation de l’IA générative ?
Le frein majeur est la confiance : les dirigeants et salariés comprennent encore mal le fonctionnement de ces technologies, ce qui alimente craintes et réticences. L’absence de formation et la difficulté à mesurer des bénéfices tangibles renforcent cette méfiance, créant un cercle vicieux où l’IA est perçue comme une menace plus que comme une opportunité.
Les petites et moyennes entreprises tirent-elles profit du numérique et de l’IA ?
Les études nous montrent que les PME et TPE françaises reconnaissent le rôle positif du numérique, mais peinent à en tirer des gains significatifs en termes de chiffre d’affaires ou de marge. Leur recours à l’IA reste marginal, limité à des usages simples comme la génération de texte ou la recherche d’information, sans véritable transformation des modèles d’activité.
Quel rôle jouent les médias dans cette lente adoption ?
Les médias contribuent à accentuer la confusion en relayant des messages contradictoires : promesses exagérées d’un côté, scénarios alarmistes de l’autre. Ce double discours entretient un climat d’incertitude et de défiance, compliquant les décisions d’investissement et renforçant la prudence des organisations face à l’IA.
Quelles conditions sont nécessaires pour accélérer l’adoption de l’IA générative ?
La clé n’est pas seulement technologique mais humaine : Former et acculturer les salariés, développer une compréhension claire des usages et instaurer une confiance dans les outils sont des préalables indispensables. C’est cette montée en compétences qui permettra aux entreprises de transformer les promesses de l’IA en gains réels de compétitivité et de productivité.