Une opportunité pour les jeunes utilisateurs des NTIC – Le Sahel


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A travers les plateformes des réseaux sociaux, la création de contenus devient un métier à part entière. De plus en plus, les jeunes nigériens s’y lancent et rassemblent des communautés d’internautes pour partager des valeurs, divertir ou même éduquer. Entre passion et opportunités économiques, les gestionnaires de ces pages exposent plusieurs défis et leurs expériences offrent une vue d’ensemble sur les perspectives de ce métier jeune au Niger.

Kaliya Gouro, créatrice de contenus, animatrice et modératrice d’événements, explique que son parcours a commencé par la passion de créer et de partager. « Au départ, je produisais des contenus sur mon quotidien, mes réflexions et mes passions. Ce n’était pas encore un métier, mais je me suis rendue compte que cela touchait des gens », raconte-t-elle. L’espace digital, de son point de vue, est un moyen qui permet aux jeunes de faire émerger leurs idées et de construire un univers personnel et professionnel. « J’ai toujours aimé communiquer, échanger et partager. Les réseaux sociaux étaient pour moi un espace d’expression, où je pouvais être créative, transmettre des messages positifs et aussi faire découvrir des choses à ma communauté », a-t-elle déclaré avant de révéler qu’elle s’inspire de ce qui se fait ailleurs sur les réseaux sociaux, surtout à travers les influenceurs africains. « Mais, je m’assure toujours d’adapter cela à notre réalité, à notre façon de parler, de vivre, d’interagir », a-t-elle souligné. Elle insiste également sur la nécessité de persévérer et la capacité à se renouveler afin de rester pertinente et développer une forte identité sur les plateformes.

Kaliya Gouro

De même, Ibrahim Hamidou Idrissa, créateur de contenus et initiateur de la célèbre émission “au micro de Ibrahim” sur TikTok et Facebook, confie avoir commencé à utiliser efficacement les réseaux sociaux entre 2016 et 2017.  Ancien animateur radio, il déclare avoir naturellement évolué vers le statut de créateur de contenus en se servant de ses compétences médiatiques et de son réseau. « Les débuts étaient vraiment difficiles. Mais j’étais persuadé que je pouvais arriver ici au Niger », a-t-il poursuivi. Aujourd’hui, il travaille avec plusieurs marques pour booster leur visibilité et promouvoir leurs produits et services chez sa communauté qui compte des centaines de milliers de personnes sur ses pages. Il insiste en revanche sur la dimension sociale et responsable de l’activité. Chaque publication, selon lui, doit avoir un impact positif sur ses abonnés. « On sensibilise sur les maladies, sur la cohésion sociale et sur le respect mutuel », a-t-il notifié.

Ibrahim Hamidou Idrissa

Pour Abdoul Karim Beidari, chargé de la communication de l’Agence Nationale pour la Société de l’Information (ANSI) et consultant international en stratégie de communication marketing, les réseaux sociaux représentent un levier d’impact positif à travers la création de contenus éducatif, informatif et engageant. « Je travaille avec des marques, des ONG et des institutions pour développer leur présence digitale et former les jeunes au marketing numérique », déclare-t-il. Pour lui, se lancer dans le domaine implique la capacité à structurer l’activité, à comprendre les objectifs des campagnes et à maîtriser les outils numériques. « Il est aussi essentiel de faire du réseautage, localement comme en ligne pour créer des synergies », recommande-t-il avant de préciser que c’est un métier encore émergent au Niger qui peut générer une réelle valeur économique et sociale.

Ainsi, la mobilisation et la gestion d’une communauté sur les réseaux sociaux implique différents rôles. Du créateur de contenus à l’influenceur, ou encore l’ambassadeur de marque, Abdoul Karim pense qu’il est essentiel de clarifier ces rôles pour que, d’une part, les créateurs puissent se positionner correctement et, d’autre part, que les marques puissent collaborer efficacement. « Un créateur de contenus produit du texte, des vidéos et ou des photos pour éduquer, divertir ou sensibiliser. L’influenceur, lui, se distingue par sa capacité à mobiliser une communauté autour de ses opinions ou recommandations. Quant à l’ambassadeur de marque, c’est souvent une personne engagée de façon plus continue avec une entreprise pour représenter ses valeurs », a-t-il précisé.

Abdoul Karim Beidari

Ibrahim explique qu’après avoir rassemblé un nombre important d’abonnés sur sa page, beaucoup ont commencé à l’appeler “influenceur” et cela conduit certains à le critiquer. « Ils disent : mais qui influence-t-il ? Mais pour moi, ils confondent juste les rôles. Je préfère m’appeler créateur de contenus car cela reflète mieux le travail que je fournis, mon impact social et ma créativité », a-t-il suggéré. De son côté, Kaliya considère le terme “influenceur” comme « un peu réducteur parce qu’il donne l’impression qu’on est là uniquement pour pousser à consommer ».

Des stratégies pour impacter positivement la communauté

Par ailleurs, ces gestionnaires de communautés en ligne développent diverses stratégies pour collaborer avec les entreprises. Si Kaliya mise sur l’authenticité de ses contenus, Ibrahim se concentre sur l’interaction avec ses abonnés. « Ce qui m’a permis de comprendre les réalités du métier et produire des contenus sur mesure », révèle-t-il. Toutefois, les réalités quotidiennes des créateurs révèlent également d’importantes contraintes. Ibrahim décrit des débuts difficiles comme le manque de financement ainsi que des nuits blanches passées à répondre aux abonnés. Kaliya évoque une méconnaissance du métier de la part des entreprises locales, ce qui complique les collaborations. Pour sa part, Abdoul Karim mentionne un déficit de visibilité à l’international, une faible structuration du secteur ainsi qu’un manque de soutien institutionnel. « Nos talents sont là, mais ils ont besoin de passerelles pour exister au-delà de nos frontières », a-t-il déclaré.

En définitive, l’avenir de la création digitale suscite un réel optimisme chez les répondants. Abdoul Karim affirme qu’au Niger, le métier est en train de passer d’un simple hobby à une véritable carrière. Il pronostique sur plus de collaborations structurées entre marques et créateurs dans un futur proche, plus de contenus de qualité, et peut-être même des régulations pour encadrer les pratiques. « Le marketing numérique va devenir un pilier incontournable pour toute organisation souhaitant rester pertinente au Niger », a-t-il expliqué. De son côté, Kaliya pense qu’il n’est pas nécessaire d’attendre de l’aide extérieure pour valoriser le métier. « J’aimerais jouer un rôle de pionnière, c’est-à-dire contribué à structurer le milieu et montrer qu’on peut être à la fois créatif, professionnel et influent », a-t-elle souligné.

Laksaci Mouhammad (Stagiaire)



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