L’année 2025 se termine en fanfare avec des innovations toujours plus spectaculaires, des investissements toujours plus élevés et des projections de croissance / C.A. toujours plus enthousiastes. Je publierai la semaine prochaine mes prévisions pour 2026, mais pour l’heure, il est grand temps de faire le bilan de mes prévisions de l’année dernière, et il n’est pas très bon. Qu’à cela ne tienne, l’exercice est toujours intéressant, et je m’y prête en connaissance de cause.

Comme tous les ans depuis presque 20 ans, je vous propose des prédictions (les premières remontent à 2006), ainsi que le bilan de ces prédictions (ici la dernière édition : Bilan de mes prédictions 2024). Un exercice intellectuel tout à fait intéressant, car il me permet d’exposer toute l’étendue de mon travail de veille (2 à 3 heures par jour depuis presque 30 ans).
J’avais l’année dernière formulé un nombre conséquent de prédictions, il faut croire que j’étais inspiré (cf. Mes 20 prédictions pour 2025). Cette profusion se traduit nécessairement par une baisse de précision, mais j’assume totalement, car l’exercice est toujours aussi réjouissant. D’autant plus qu’il est très difficilement automatisable, puisque les chatbots ont bien du mal à générer des prédictions intéressantes dès qu’il est question d’analyser de très très grandes quantités de données.
Pour illustrer mon propos, voici les 10 faits marquants de l’année 2025 qui ont été identifiés par ChatGPT, Gemini et Grok avec leur fonction « Deep Research » (et synthétisés par Claude) :
- Émergence de l’intelligence artificielle agentique comme tendance technologique majeure ;
- Entrée en vigueur du règlement européen sur l’IA (AI Act) ;
- ChatGPT dépasse 5 milliards de visites mensuelles au 2ᵉ trimestre 2025, se classant 5ᵉ site web mondial, avec plus de 300 millions d’utilisateurs actifs hebdomadaires ;
- Google dévoile sa puce quantique Willow (105 qubits), capable de réaliser en 5 minutes un calcul nécessitant 10²⁵ années aux meilleurs supercalculateurs, démontrant un qubit logique avec correction d’erreurs ;
- Le coût annuel mondial de la cybercriminalité dépasse 10 500 milliards de dollars en 2025, soit 50 fois les dépenses mondiales en cybersécurité ;
- Arrêt officiel des mises à jour de sécurité de Windows 10 par Microsoft le 14 octobre 2025, contraignant à une migration vers Windows 11 ou des alternatives ;
- Les abonnements 5G mondiaux atteignent 2,9 milliards fin 2025, représentant un tiers des abonnements mobiles, avec 55 % de la population mondiale couverte ;
- Le chiffre d’affaires mondial du e-commerce atteint 6.419 milliards de dollars en 2025, représentant 20,5 % des ventes au détail ;
- 78 % des organisations utilisent l’IA en 2025, contre 55 % l’année précédente, avec une généralisation des plateformes de gouvernance de l’IA ;
- Premiers déploiements de protocoles de chiffrement résistants aux ordinateurs quantiques par les institutions financières et gouvernementales.
Comme vous pouvez le constater, cette liste intègre essentiellement des faits (statistiques) ou des constats génériques, elle manque cruellement d’appréciation et de discernement. D’où l’intérêt de faire des prédictions « à la main », c’est-à-dire de s’appuyer sur un travail de veille, mais également sur le ressenti, l’intuition. Je renouvellerai ce travail de prédictions synthétiques dans mon prochain article pour que vous puissiez mieux juger de la différence.
J’arrête là mes digressions et je vous propose sans plus tarder le bilan des mes prédictions 2025.
OpenAI explose en cours de vol = 😖
L’éditeur de ChatGPT est très clairement LA startup la plus en vue en ce moment, celle vers laquelle tous les projecteurs sont braqués, celle qui subit les plus fortes critiques et qui nourrit les espoirs les plus fous. La pression est gigantesque, mais force est de constater que cette jeune société s’en sort très bien, car ils ont su opérer une restructuration, trouver de nouveaux partenaires industriels (Oracle) et se diversifier dans de nombreux domaines (commerce en ligne, navigateur, application de génération de vidéos…) tout en se maintenant dans le haut du classement pour son modèle de référence (GPT 5.1).
Quid de l’année prochaine ? Les revenus sont en croissance et les niveaux d’adoption sont bons (The state of enterprise AI), donc il n’y a visiblement pas de raisons de s’inquiéter, car la dette est pour le moment assumée par des investisseurs privés. Reste à voir comment ils vont aborder les prochaines années (Three Years of ChatGPT: Now the Hard Questions Begin).
Anthropic s’impose comme l’acteur de référence de l’IA générative = 😐
L’éditeur de Claude est tout ce que l’éditeur de ChatGPT n’est pas : discret, responsable et humble. Cette culture interne, portée par le fondateur, se traduit par des produits à la pointe, dont la très impressionnante dernière version de son modèle de référence (Anthropic’s Claude Opus 4.5 is here: Cheaper AI, infinite chats, and coding skills that beat humans).
Impossible de dire si Anthropic est effectivement l’acteur de référence de l’IA générative, car la compétition est très dure, mais cet éditeur s’est octroyé une place de choix dans les habitudes des spécialistes de l’IA. Ceci étant dit, l’audience de Claude reste très largement inférieure à celle de ChatGPT qui peut être considéré comme LE service de référence si l’on ne se fonde que sur le nombre d’utilisateurs et sur les jeunes (Teens, Social Media and AI Chatbots).
Quid de l’année prochaine ? Avec des revenus en forte croissance et des investisseurs industriels de choix (amazon, Google…), Anthropic devrait logiquement se maintenir dans le trio de tête des acteurs de l’IA générative. Ils devront toute fois décider d’un positionnement plus lisible pour Claude afin de le démarquer de ChatGPT.
Perplexity se fait plier en quatre = 😖
Comparée aux géants numériques (Google, Microsoft…), OpenAI est une petite startup, mais Perplexity l’est encore plus ! Je pensais que cette toute petite startup se ferait soit engloutir, soit annihiler par des recours en justice (Reddit sues Perplexity for allegedly ripping its content to feed AI) ou actions défensives (Amazon sends legal threats to Perplexity over agentic browsing). Il faut croire que le service plait et qu’il démontre une très forte capacité de résilience.
Quid de l’année prochaine ? Avec des concurrents aussi puissants que ChatGPT, Claude, Gemini, Copilot… je doute que Perplexity parviennent à trouver des relais de croissance. Attendez-vous à un rachat ou une lente asphyxie.
Montée en puissance de l’assistant Meta AI = 😐
Au cours de l’année écoulée, le patron de Meta a dépensé sans compter pour recruter les plus grands talents de l’IA (on parle d’une enveloppe qui avoisine le milliard de $ pour quelques dizaines de recrutements). Mais les effets de ces recrutements ne se feront ressentir que dans quelques mois ou années, car pour le moment, si Meta AI est effectivement disponible pour une grosse partie de l’immense audience de Facebook / Instagram / WhatsApp (Meta AI now has 1B monthly active users), les usages peinent à décoller. Le fait est que les chatbots concurrents sont supérieurs, et que ChatGPT a su profiter du succès viral de son application mobile (OpenAI is launching the Sora app, its own TikTok competitor, alongside the Sora 2 model). Il y a manifestement une rencontre qui ne s’est pas faite entre les membres de la grande famille Meta et son assistant numérique.
Quid de l’année prochaine ? Pas certain que Meta puisse faire la différence avec ce chatbot. En revanche, je suis tout à fait confiant dans la capacité des équipes à trouver de nouveaux usages et à packager ça dans les applications existantes. À surveiller de très près.
L’avènement des agents intelligents et des outils de création / gestion d’agents = 😁
Les agents intelligents sont assurément LA technologie de l’année, celle dont tout le monde parle (Êtes-vous prêt pour le web agentique ?). Cette prédiction était très certainement la moins risquée de ma série, donc pas de quoi fanfaronner. Pour une vision claire des enjeux, je vous recommande cette publication du Forum Économique Mondial : AI Agents in Action: Foundations for Evaluation and Governance.
Quid de l’année prochaine ? Pareil, mais en mieux !
Toujours plus de contenus visuels et moins de contenus textuels = 😁
J’ai déjà eu l’occasion de vous expliquer que j’adhère tout à fait à la théorie de la fin de la civilisation de l’écrit : avènement des smartphones et des médias sociaux, simplicité des outils de production de contenus visuels, perfectionnement des modèles génératifs d’images ou de vidéo… sont autant de clous enfoncés dans le cercueil des médias écrits (journaux, magazines, mais également blogs et sites web). Il en résulte une écrasante domination des plateformes sociales visuelles (YouTube, Instagram, TikTok…) par rapport aux médias numériques écrits (blogs, newsletters…) qui continuent d’exister, ce n’est pas la question, mais sont réservés à une sorte d’élite intellectuelle, celle qui accepte de lire (Les zones d’ombre du rapport Pisa et ses conséquences pour les medias d’information). Les médias traditionnels ne survireront que s’ils parviennent à s’adapter (Comment la presse doit adapter son offre face à la chute vertigineuse des capacités de lecture et Short-Form ‘Microdramas’ Win Growing Advertiser Support).
Quid de l’année prochaine ? Pareil, mais en pire !
Un retour de Facebook en tant que plateforme sociale de proximité = 😖
Facebook en comme un géant endormi dans le coin d’une pièce : Tout le monde sait qu’il existe (difficile de ne pas le remarquer au vu de sa taille), mais il ne fait quasiment plus jamais parler de lui, éclipsé par des plateformes sociales plus modernes (ex : TikTok, Twitch, Instagram…). Pourtant, Facebook reste, jusqu’à preuve du contraire, le plus grand média de l’histoire de l’humanité avec plus de 3 milliards de membres (cf. mon Panorama des médias sociaux 2025). Quoi que vous en pensiez, Facebook reste l’application sociale de référence pour de nombreux utilisateurs (séniors), ainsi qu’une des principale source d’informations (Facebook’s Algorithm Update Aims to Show You Reels You’ll Actually Like). Ce repositionnement sur les interactions sociales de proximité était plutôt une bonne chose, d’autant plus que le pic d’utilisation des flux de contenus est derrière nous (Have we passed peak social media?).
Quid de l’année prochaine ? Difficile à dire, car Facebook est un objet social qui « appartient » maintenant à ses utilisateurs, ce sont eux qui décident de la meilleure façon de l’utiliser (Facebook Dating Is a Surprise Hit for the Social Network).
Threads s’impose comme la seule alternative crédible à Twitter = 😖
Je pense ne rien vous apprendre en écrivant que Twitter est devenu une plateforme sociale difficile à apprécier tant elle regorge de conversations très polarisées (c’est un euphémisme) et de manipulations de l’opinion (Top MAGA Influencers Accidentally Unmasked as Foreign Trolls). Voilà pourquoi j’étais persuadé qu’il existait une place à prendre pour une application sociale alternative permettant d’échanger des micro-contenus (messages, images, vidéos…). Nous pensions à l’époque que BlueSky pouvait incarner cette alternative, mais cette plateforme souffre visiblement d’une orientation politique beaucoup trop marquée (c’est le nouveau QG des activistes d’extrême gauche). La candidate logique était Threads, la nouvelle application de Meta qui peut à la fois s’appuyer sur l’audience captive de Facebook et Instagram, mais également sur le savoir-faire et les ressources de Meta. Il en ressort une application avec une audience en forte croissance (500 M d’utilisateurs mensuels et 150 M d’utilisateurs journaliers) et des fonctionnalités très intéressantes (You can now attach 10,000 character blogs to your Threads posts ou Threads targets podcasters with new features, aiming to become the home for show discussions), mais une exposition médiatique quasi nulle.
Quid de l’année prochaine ? Même si Meta dispose de moyens considérables pour stimuler la croissance de Threads, cette application sociale n’est en rien une chambre d’écho médiatique équivalente à Twitter. Même avec ses 600 M d’utilisateurs (5 fois moins que YouTube ou Instagram), X reste LA référence des médias et des hommes / femmes de pouvoir. La grande inconnue reste la trajectoire d’intégration de Grok, assurément le chatbot le plus sous-côté.
TikTok se focalise sur le commerce et la découverte de produits = 😁
Encore une prédiction qui ne m’a pas demandé beaucoup d’effort. Là encore, je pense ne rien vous apprendre en écrivant que TikTok est devenu en quelques années un acteur majeur du commerce en ligne grâce aux TikTok Shops et à la capacité de recommandations des créateurs : TikTok Shop Is Now the Size of eBay. Le phénomène est tel que le législateur commence à s’y intéresser (À l’Assemblée nationale, les députés tentent de comprendre TikTok Shop et le fonctionnement de la publicité), d’autant plus que la célèbre application mobile lorgne du côté des « bijoux de famille » de l’économie française : TikTok Shop Pushes Into Luxury Retail With $11,000 Handbags.
Quid de l’année prochaine ? Il n’y a, à priori, aucune raison pour que cette trajectoire s’infléchisse, au contraire ! Les marques et distributeurs vont devoir impérativement exploiter TikTok non pas comme un apporteur de trafic qualifié, mais comme un point de vente.
Recherche de diversité dans le social planning des annonceurs = 🤨
Si vous vous intéressez de près ou de loin aux médias sociaux, alors vous savez déjà que l’essentiel des budgets publicitaires est capté par 5 acteurs (Facebook, Instagram, YouTube, TikTok, LinkedIn). La volonté des annonceurs de diversifier leurs sources de trafic ou d’exposition est grande, mais se limite généralement aux plateformes sociales de second rang (Twitch, Pinterest, X…), pour finalement concentrer les moyens sur les plus fortes audiences (Americans’ Social Media Use 2025). Y a-t-il un échappatoire à cet oligopole ? Non je ne pense pas. Mais ce n’est pas un drame, car la situation est rigoureusement la même pour d’autres médias (TV, radio…).
Quid de l’année prochaine ? Là encore, je ne vois pas quel facteur externe pourrait bouleverser l’ordre établi, même la potentielle interdiction pour les moins de 16 ans (European Parliament backs 16+ age rule for social media), car les médias sociaux occupent une place centrale dans le quotidien des consommateurs (Scroll, search, shop : la découverte des marques a explosé sur les réseaux sociaux en 2025 et 38% des Français déclarent que les influenceurs ont un impact sur leur façon de penser).
LinkedIn se recentre sur l’événementiel BtoB = 😖
Vous avez très certainement pu constater que depuis la période COVID, l’événementiel BtoB n’est jamais revenu à son plus haut historique. Certes, il y a de nombreux événements physiques, notamment à Paris, mais c’est une pratique qui souffre du manque de temps et de la saturation des cibles. Je pensais qu’avec sa position archi-dominante sur l’audience professionnelle LinkedIn pouvait faire la différence et s’imposer sur ce créneau, mais ils ont visiblement mieux à faire, et misent plutôt sur les newsletters, les vidéos et les leaders d’opinion pour stimuler les revenus publicitaires (LinkedIn Highlights Thought Leader Ad Opportunities in Campaign Manager).
Quid de l’année prochaine ? Si vous aussi vous constatez une chute vertigineuse de la portée organique de vos publications sur LinkedIn, ne cherchez pas : c’est la faute à l’IA. Non pas que les publications synthétiques encombrent le flux de publications, mais que la maison-mère de LinkedIn (Microsoft) a désespérément besoin de cash pour pouvoir financer les nouvelles infrastructures cloud servant à faire tourner les chatbots. D’où la baisse de la portée organique pour vous forcer la main avec une toute nouvelle offre de sponsorisation des publications en 1 clic.
Les chatbots deviennent des sources d’information = 😁
Puisque l’on parle de chatbots, encore une prédiction avec une faible prise de risque, mais qui s’est quand même réalisée puisque la recherche d’informations représente 1/4 des requêtes, soit l’un des principaux usages : How people are using ChatGPT. Ce glissement des usages ouvre de nouvelles perspectives pour les outsiders (Meta signs commercial AI data agreements with publishers to offer real-time news on Meta AI), mais il apporte également son lot de questionnements (Voters’ minds are hard to change, but AI chatbots are surprisingly good at it).
Quid de l’année prochaine ? Si mes calculs sont exacts, ChatGPT et Gemini rentrent dans la définition des VLOSEs (« Very Large Online Search Engines« ), donc devraient se plier aux règles du Digital Services Act européen. Attendez-vous à ce que l’utilisation des chatbots dans un but d’information fasse l’objet d’une surveillance renforcée, d’autant plus s’il y a des abus (Google Is Testing AI-Generated Headlines, and It’s Not Going Well). Actualités mises à part, l’impact des chatbots sur les usages et la recherche est maintenant bien documentée, il n’y a plus qu’à faire évoluer vos pratiques (Du SEO au GEO : Comment adapter votre référencement à l’ère des IA génératives, chatbots et assistants ?).
Le micro-média est le nouveau site web = 😁
Saviez-vous que les lettres d’information publiques remontent à l’époque romaine ? Un format historique de diffusion de l’information qui a trouvé un second souffle avec le courrier électronique aux débuts du web. Puis sont apparus les blogs et les premières grandes plateformes sociales. Puis le phénomène de saturation des flux de publication a donné un troisième souffle aux newsletters (plus intimistes et surtout plus faciles à monétiser). Universel, léger et versatile, l’email est un format très simple à travailler, d’autant plus avec l’avènement des modèles génératifs qui savent parfaitement les exploiter (Comment l’IA générative renforce la place centrale de l’email dans votre écosystème numérique). Entre la domination des médias sociaux, la technicité des pratiques de SEO et la barrière technique, il est tout à fait normal que ceux qui cherchent à s’exprimer ou à monétiser leurs prises de parole se tournent vers des supports plus faciles à maîtriser comme les newsletter, l’alternative ultime aux médias sociaux.
Quid de l’année prochaine ? Toutes les raisons qui ont fait le succès des newsletters en tant que micro-média seront encore là l’année prochaine. Portées par le succès des solutions intégrées (édition + distribution + monétisation) comme Substack ou Patreon, les newsletters font partie du paysage médiatique et sont là pour durer (après tout, c’est une pratique qui remonte à l’antiquité).
Le début de la fin du règne des applications mobiles natives = 🤨
Voilà plusieurs années que le nombre d’applications mobiles disponibles dans les places de marché d’applications ne progresse plus (plus ou moins 2 M pour Android et iOS). De même, le nombre d’applications régulièrement utilisées par les mobinautes s’est stabilisé à une dizaine par semaine. Force est de constater que des habitudes ont été prises et que l’essentiel de l’attention des mobinautes est accaparé par quelques grandes applications que l’on peut compter sur les doigts d’une seule main (Instagram, TikTok, YouTube, Facebook…).
Après une période d’euphorie, l’App Economy semble avoir trouvé sa vitesse de croisière avec un double plafond de verre : les coûts de développement / distribution, ainsi que les limitations imposées par Apple et Google (restrictions d’accès aux données du smartphone). Il en résulte une recherche logique d’alternatives, notamment les PWAs dont je vous parle depuis un certain temps (Pourquoi les Progressive Web Apps sont la seule alternative viable aux applications natives), d’autant plus avec l’avènement des modèles génératifs de code qui sont maintenant capables de créer des applications parfaitement viables, voir des générer des interfaces à la volée, en fonction des besoins et du contexte : Le retour de la revanche des applications (quasi) instantanées. Sur le papier, ça fonctionne, mais comme précisé plus haut, les habitudes sont déjà prises, ce qui limite le potentiel de la Generative User Inerface (GenUI : de la personnalisation aux concierges numériques).
Mais la surprise pourrait venir des chatbots qui sont maintenant capables d’exploiter des services tiers : OpenAI announces Apps SDK allowing ChatGPT to launch and run third party apps like Zillow, Canva, Spotify. Vous pourriez me dire que ChatGPT est une application native, et vous auriez raison. En revanche, que se passera-t-il quand Gemini, Copilot ou Siri proposeront un système équivalent ?
Quid de l’année prochaine ? Le succès rencontré par les fonctions marchandes de ChatGPT ne peut qu’inciter les marques et distributeurs à intégrer ce qui peut maintenant être considéré comme une plateforme. Elles seront en revanche plus réticentes à l’idée de se faire à nouveau imposer les conditions de Google et Apple en intégrant Gemini et Siri. Le dilemme sera de choisir entre une application mobile native qui coûte cher et dont les marques ont plus ou moins le contrôle (puisqu’elles sont dépendantes des places de marché d’applications), et une API marchande qui sera exploitée par les chatbots (avec un risque d’invisibilisation et un gros taux de commissionnement).
Les super apps s’imposent auprès des utilisateurs en recherche d’usages numériques alternatifs = 😖
Les super apps sont un sujet qui me tient à coeur, et dont je vous ai déjà parlé à de nombreuses reprises : L’avènement des super apps. Mais malgré les tentatives de nombreux acteurs (Uber, PayPal…), la mainmise de Google et Apple sur les smartphones des utilisateurs occidentaux est trop forte. Si le législateur a enfin réussit à réduire cette emprise (Google is easing up on Android’s new sideloading restrictions), les super apps n’ont réussies à trouver leur public qu’en Asie et en Amérique du Sud. Je pensais qu’une application comme Telegram pourrait y parvenir en jouant la carte du Web3 pour fédérer une communauté d’utilisateurs en recherche d’alternatives aux grandes plateformes, mais il faut croire que la taille critique n’a jamais été atteinte.
Quid de l’année prochaine ? Je doute que les super apps parviennent à s’installer en Europe ou en Amérique du Nord, d’autant plus qu’une nouvelle génération de plateformes agrégeant des contenus et services tiers est en train d’émerger : les chatbots.
Apple revoit à la baisse ses ambitions en matière d’informatique spatiale = 😁
Encore une prédiction qu’il était facile d’anticiper tant le prix très élevé et le nombre limité d’applications ont coupé les pattes du masque de réalité mixte de la firme de Cupertino (Apple Suspends Work on Next Vision Pro, Focused on Releasing Cheaper Model in Late 2025). Les ambitions d’Apple en matière d’informatique spatiale était fortes, c’est indéniable, mais le raz de marée de l’IA a forcé Apple a revoir sa stratégie et surtout à ré-orienter ses ressources pour tenter de mettre à niveau Siri face à ses concurrents. Visiblement ils ont bien du mal à relancer la machine à innover qui a fait leur succès : Apple’s new AI chief quits weeks after appointment et Apple nears deal to pay Google $1B annually to power new Siri.
Quid de l’année prochaine ? Avec des équipes fortement réduites et de nouvelles priorités (refondre Siri), Apple ne parviendra pas à imposer sa vision de l’informatique spatiale au marché, c’est une évidence. D’autant plus que la concurrence vient de se renforcer avec le choc entre Meta et Google sur le terrain de la réalité étendue (augmentée + virtuelle).
Retour en force des fabricants chinois dans la réalité augmentée = 😁
Puisque l’on parle de réalité augmentée, comment ne pas s’émerveiller de toutes lunettes intelligentes lancées par des constructeurs chinois :
Si vous pensez que les lunettes de réalité augmentée sont un rêve de geek et que l’échec des Google Glass a définitivement tué le concept, cet article saura vous convaincre du contraire : Two Visions for the Future of AR Smart Glasses.
Quid de l’année prochaine ? 2026 sera assurément l’année 1 des lunettes de réalité augmentée avec de nouveaux produits très TRÈS convaincants, aussi bien de chez Meta et Google, que des fabricants chinois.
Une meilleure appréhension du métavers = 🤨
J’ai beaucoup parlé du métavers en 2022 et 2023, et j’espère sincèrement vous avoir convaincu du potentiel des environnements virtuels récréatifs (Roblox, Fortnite, Minecraft…). Dans le cas contraire, il vous suffit de constater les dernières annonces pour bien appréhender le marché et le potentiel de croissance des loisirs numériques : Roblox lifts bookings forecast et Fortnite is getting Unity games. Mais malgré ça, le métavers continue d’avoir mauvaise presse, parce que l’on adore se moquer des échecs des autres : Meta’s Zucerberg plans deep cuts for metaverse efforts.
Ceci étant dit, avec l’arrivée à maturité des modèles physiques (« les « World models »), la génération d’environnements 3D réalistes est maintenant beaucoup plus simple : Fei-Fei Li’s World Labs speeds up the world model race with Marble, its first commercial product. Ceci ouvre de nouvelles perspectives, notamment pour les pionniers : Meta Reveals ‘WorldGen’ Tool to Generate VR Worlds from AI Prompts.
Quid de l’année prochaine ? Je suis bien incapable de vous dire si nous aurons le métavers avant l’IA généraliste : mais ce qui est certain, c’est que ces deux chimères technologiques sont sur des trajectoires qui vont nécessairement se recouper.
Une fracturation encore plus marquée de l’internet entre les blocs Amériques / Europe / Chine = 😁
Il ne vous aura pas échappé que l’IA est devenu un sujet géopolitique de la plus haute importance, avec une restriction par les États-Unis en milieu d’année de l’exportation de puces « hautes performances » vers la Chine, puis un accord alambiqué qui permet à l’Oncle Sam de contrôler les exportations tout en touchant une commission (Nvidia AI Chips to Undergo Unusual U.S. Security Review Before Export to China). Vous vous doutez bien que je ne suis pas dans le secret de ces négociations, mais en revanche, je sais que cette interdiction a eu pour principal effet de stimuler la production locale (Huawei’s chip breakthrough prompts US to relax AI export controls). Et pendant ce temps-là, l’UE fait ce qu’elle peut pour limiter l’impact d’une trop forte régulation : Europe is scaling back its landmark privacy and AI laws.
Quid de l’année prochaine ? Il ne vous aura pas échappé que la course à l’IA cristallise les tensions entre les grands blocs géopolitiques, mais qu’elle n’est que la partie visible de l’iceberg de la souveraineté numérique. Un sujet qui anime les débats à Bruxelles (Sommet sur la souveraineté numérique européenne : des engagements emblématiques pour une Europe plus compétitive et souveraine), mais dont on a du mal à percevoir les bénéfices…
Beaucoup de bullshit autour de l’informatique quantique = 🤨
Dire que le sujet de l’informatique quantique est complexe est un euphémisme. En toute honnêteté, je ne comprends pas grand-chose à l’informatique quantique, si ce n’est qu’elle est bien plus complexe qu’on ne le pense. Toujours est-il que nous avons assisté à de nombreuses annonces retentissantes cette année, dont très peu sont celles et ceux capables d’en apprécier la teneur :
Quid de l’année prochaine ? Si le sujet vous intéresse, vous pouvez aller vous renseigner sur le blog d’Olivier Ezratti, car je ne me sens pas suffisamment compétent, si ce n’est pour vous rappeler que nous parlons ici d’une autre branche de l’informatique. Un domaine encore extrêmement expérimental, pour lequel il est très TRÈS hasardeux de faire des comparaisons ou rapprochements avec l’informatique traditionnelle (celle qui repose sur les 0 et les 1).
Ceci conclue le bilan de ma looooooongue liste de prédictions pour les usages et technologies numériques en 2025. Je ferai plus court la prochaine fois, c’est promis !