Meta se retrouve une nouvelle fois sous le feu des critiques sur la gestion de son écosystème publicitaire. Alors que Facebook et Instagram sont officiellement interdits en Chine depuis plus de quinze ans, le pays s’est imposé comme un pilier discret mais massif des revenus publicitaires du groupe.
Une situation paradoxale, qui pose aujourd’hui la question de la cohérence entre un discours de responsabilité et des arbitrages économiques…
La Chine, moteur publicitaire malgré l’interdiction des plateformes
Si les internautes chinois ne peuvent pas accéder à Facebook ou Instagram, les entreprises locales, elles, disposent d’un accès étendu aux outils publicitaires de Meta pour cibler des audiences étrangères.
Ce mécanisme aurait permis à la Chine de représenter plus de 18 milliards de dollars de revenus publicitaires en 2024, soit plus de 10% du chiffre d’affaires global du groupe. Des acteurs comme Shein, sous le feu des autorités, figurent parmi les plus gros annonceurs mondiaux de Meta… devant Amazon.
Mais derrière ces volumes se cache une réalité plus trouble… En effet, selon des documents internes relayés par Reuters, près d’une publicité chinoise sur cinq enfreindrait les règles de Meta. Entre les arnaques à l’investissement, les jeux d’argent illégaux, les produits interdits et les contenus sexuels, cela constituerait une part significative de ces annonces.
À l’échelle mondiale, la Chine serait même à l’origine d’environ un quart des publicités frauduleuses diffusées sur les plateformes du groupe.
Une lutte antifraude freinée pour préserver les revenus
Face à l’ampleur du phénomène, Meta avait pourtant lancé en 2024 une équipe dédiée à la lutte contre la fraude publicitaire chinoise, et en quelques mois, la part des annonces frauduleuses est passée de 19% à 9% des revenus publicitaires issus de Chine.
Cette dynamique a cependant été stoppée fin 2024. En interne, l’argument avancé tenait à l’impact direct de ces mesures sur la croissance des revenus. Officiellement, Meta affirme vouloir combattre les arnaques partout dans le monde, mais les documents consultés évoquent un renoncement assumé à l’objectif de traiter la Chine comme les autres marchés.
Un réseau d’intermédiaires qui complique la modération
Meta s’appuie aujourd’hui sur onze partenaires chinois, chargés de revendre ses espaces publicitaires via un réseau dense d’agences intermédiaires. Ce système, jugé trop opaque, rend les contrôles difficiles et favorise la multiplication de faux comptes et d’identités masquées.
Certaines de ces agences bénéficieraient de mécanismes comme le « whitelisting« , qui ralentirait la suspension des annonces signalées. D’après plusieurs enquêtes, ce délai suffit souvent aux fraudeurs pour atteindre leurs objectifs avant toute intervention humaine.
À la mi-2025, la fraude publicitaire chinoise avait déjà repris de l’ampleur, représentant à nouveau près de 16% des revenus de Meta dans le pays, ce qui rappelle une étude qui évoque 16 milliards de dollars grâce aux publicités illégales…